L'armée russe a annoncé vendredi être parvenue à un accord pour l'évacuation aux portes de Damas de la dernière poche rebelle dans la Ghouta orientale, qui signifierait la chute de l'enclave, une annonce toutefois aussitôt démentie par les insurgés.

Dans le même temps, pour le septième jour consécutif, des centaines de rebelles se préparent à évacuer l'avant-dernière poche de la Ghouta, celle d'Arbine, plus au sud, dans le cadre d'un accord parrainé par Moscou.

Soutenu par son allié russe, le pouvoir de Bachar al-Assad a déjà reconquis plus de 90 % de l'enclave à la périphérie de la capitale syrienne, dont la fin constituerait une étape importante dans le conflit syrien.

À la faveur d'une offensive meurtrière lancée le 18 février, le régime a contraint deux des trois groupes rebelles présents dans la zone à accepter des évacuations.

Et alors que des pourparlers sont en cours depuis plusieurs jours, un membre de l'état-major de l'armée russe a annoncé vendredi, lors d'une conférence de presse à Moscou, qu'un accord avait été conclu avec Jaich al-Islam, groupe rebelle présent dans l'ultime poche, celle de Douma.

« Un accord a été conclu avec les dirigeants des groupes armés illégaux pour la sortie des rebelles et des membres de leur famille hors de la ville de Douma dans un futur proche », a affirmé le général Sergueï Roudskoï.

Un tel accord marquerait la perte de la Ghouta et la pire défaite pour les rebelles en Syrie, mais l'information a aussitôt été démentie à l'AFP par Jaich al-Islam.

Menace de nouveaux combats

« Nous ne sommes pas encore parvenus à un accord », a assuré le porte-parole du groupe islamiste, Hamza Bayraqdar. « Nous refusons catégoriquement de partir. C'est un élément incontournable dans les négociations », a-t-il précisé.

Jaich al-Islam accepte de désarmer, mais demande en contrepartie que ses combattants restent à Douma, où serait déployée la police militaire russe, mais pas l'armée du régime, selon des sources proches du groupe.

De son côté, Moscou ne veut pas négocier un accord différent de ceux passés avec les autres groupes rebelles : les habitants peuvent rester sur place dans le cadre d'un accord de « réconciliation », les combattants et ceux qui le souhaitent sont évacués vers le nord-ouest.

Face à l'absence de progrès dans les pourparlers, le régime syrien menace depuis plusieurs jours de reprendre les combats pour déloger le groupe de Douma, la principale ville de l'ensemble des anciennes zones rebelles de la Ghouta.

« Le problème avec Jaich al-Islam, c'est que c'est une organisation importante, homogène, bien organisée, mais qui ne s'entend pas bien avec les autres groupes. Ce serait vraiment compliqué pour eux de s'installer ailleurs », a expliqué Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie à l'université d'Edimbourg.

Pour faire pression sur les insurgés, les forces du régime ont consolidé leur présence aux portes de Douma.

« Nous espérons qu'une solution va être trouvée et qu'on en finisse. Moi, je n'ai pas peur de rester, je suis pour la réconciliation. Je ne suis pas resté pendant tout ce temps ans pour partir maintenant, à la fin » du siège, a témoigné Mohammad al-Hussein, 39 ans, un habitant de Douma.

La Ghouta « nettoyée »

Dans la poche sud, en cours d'évacuation depuis le 24 mars, quelque 2300 combattants islamistes avec leurs proches, mais aussi des civils, avaient traversé les rues dévastées d'Arbine pour prendre place à bord des bus destinés à les évacuer, selon l'agence officielle syrienne Sana.

Pilonnés par un déluge de feu après une offensive meurtrière de cinq semaines, qui a tué plus de 1600 civils selon l'OSDH, les groupes rebelles abandonnent les uns après les autres leurs positions pour être relocalisés dans la province d'Idleb (nord-ouest), dont le contrôle échappe presque entièrement au régime.

En neuf jours, plus de 36 000 personnes, des combattants des groupes islamistes Faylaq al-Rahmane et Ahrar al-Cham, leurs proches et d'autres civils, ont déjà quitté la Ghouta orientale pour le nord-ouest du pays, selon un décompte de l'agence officielle syrienne Sana.

Quelque 143 000 personnes ont par ailleurs fui les territoires insurgés dans la Ghouta pour rejoindre les secteurs gouvernementaux ou des zones sous contrôle des rebelles, d'après Sana.

La Ghouta orientale « est presque entièrement nettoyée des éléments terroristes et extrémistes », a assuré jeudi le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, à Moscou.

Grâce au soutien militaire des Russes, le pouvoir de Damas a pu renverser la donne dans le conflit qui ravage la Syrie depuis 2011, multipliant les victoires face aux rebelles et aux jihadistes, jusqu'à reconquérir plus de la moitié du pays.

En début d'année, il a fait de la Ghouta orientale sa priorité, alors que les rebelles de ce secteur, assiégé depuis 2013, tiraient obus et roquettes meurtriers sur la capitale.

Le conflit syrien a fait plus de 350 000 morts et s'est transformé en une guerre complexe impliquant une variété d'intérêts et de belligérants.