Plus de 500 civils dont une centaine d'enfants ont péri sous les bombes déversées depuis sept jours par le régime syrien sur le fief rebelle de la Ghouta orientale, un carnage que la communauté internationale n'est pas encore parvenue à stopper.

Un vote attendu vendredi au Conseil de sécurité sur une trêve humanitaire d'un mois en Syrie a été repoussé à samedi 12 h (heure de l'Est), après plusieurs reports illustrant les divisions sur le conflit qui ravage la Syrie depuis près de sept ans.

Des négociations ont été menées pour éviter un veto de la Russie, allié indéfectible du régime de Bachar al-Assad, et un nouveau texte de résolution prévoyant un cessez-le-feu immédiat a été mis au point avec l'espoir qu'il sera adopté.

En attendant le vote, l'aviation et l'artillerie du régime ont pilonné la Ghouta orientale pour le septième jour consécutif, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), affirmant que l'aviation russe participe aux raids, ce que Moscou dément.

Au moins 32 civils dont huit enfants sont morts samedi dans les bombardements, après des frappes intenses nocturnes qui ont provoqué des incendies dans des quartiers résidentiels, a précisé l'ONG.

En sept jours, 510 civils ont été tués, dont 127 enfants, a indiqué à l'AFP le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.

Dans une clinique de fortune à Douma, principale ville de la Ghouta soumise à un déluge de feu, chaque journée s'accompagne de drames humains, rapporte un correspondant de l'AFP.

Un garçonnet de quarante jours a ainsi perdu toute sa famille dans les raids, raconte Mouafac, un infirmier.

«On a trouvé une femme capable d'allaiter, cela fait quatre jours qu'elle est chez nous, elle a été amputée au genou», précise le jeune homme de 24 ans. «Elle allaite le petit».

Plusieurs corps, dont ceux d'enfants, ont été placés dans une pièce transformée en morgue. Penchés sur les victimes, des hommes pleurent un neveu ou un fils.

«Rien à manger»

«Vous ne pouvez pas imaginer ce qui se passe dans la Ghouta», a lancé avec colère à l'AFP un habitant, Salem.

«Comment le Conseil de sécurité ne parvient-il pas à adopter une simple résolution pour cesser le feu contre les civils?» a-t-il demandé. «Nous ne voulons pas que vous nous donniez à manger ou à boire. Juste arrêtez la tuerie»!

Cette nouvelle campagne aérienne dévastatrice a été lancée le 18 février par le régime en prélude à une offensive terrestre pour reprendre ce dernier fief contrôlé par les rebelles aux portes de Damas, un bastion du pouvoir.

«Le monde doit dire «Stop à ce massacre»» dans la Ghouta orientale, a déclaré samedi sur Twitter le porte-parole de la présidence turque, Ibrahim Kalin.

Soumis à un siège asphyxiant depuis 2013 par le régime, les quelque 400 000 habitants de la Ghouta subissent au quotidien pénuries de nourriture et de médicaments.

Sur les marchés, le pain a disparu, et les habitants se nourrissent avec les moyens du bord.

«Je n'ai rien mangé depuis avant-hier», confie en pleurant Mahassen, réfugiée dans un abri sous-terrain avec ses deux enfants. «Cela fait trois jours qu'ils pleurent», lâche-t-elle.

En représailles aux raids, les rebelles tirent roquettes et obus sur la capitale Damas. Depuis le 18 février, une vingtaine de personnes ont péri dans ces frappes, qui ont fait six blessés samedi, selon les médias officiels.

Même scénario

Le scénario dans la Ghouta s'était déjà déroulé dans plusieurs fiefs rebelles, dont Alep en 2016, écrasée par des bombardements et le siège pour forcer les insurgés à déposer les armes.

Les principaux groupes rebelles contrôlant la Ghouta orientale, Jaich al-Islam et Faylaq al-Rahmane, ont rejeté toute évacuation de civils et de combattants.

Cette campagne militaire utilisant bombes, barils d'explosifs et obus est d'une rare intensité, même pour un pays ravagé depuis 2011 par une guerre qui a fait plus de 340 000 morts.

Jeudi, le représentant syrien à l'ONU, Bachar Jaafari, avait réitéré la position du régime, déterminé à reprendre coûte que coûte l'ensemble du pays, y compris la Ghouta. «Oui la Ghouta orientale deviendra un nouvel Alep», a-t-il martelé.

Déclenché en 2011 par la répression de manifestations pacifiques prodémocratie, le conflit qui a opposé au départ les rebelles au régime, s'est complexifié avec l'implication de groupes djihadistes et de puissances étrangères.

Grâce à l'appui militaire de Moscou, le régime a renversé la donne en multipliant les victoires face aux rebelles et aux djihadistes, jusqu'à reprendre le contrôle de plus de la moitié du territoire.

PHOTO HAMZA AL-AJWEH, AFP

De nombreux enfants ont été blessés ou tués par les frappes.