Le dernier carré de rebelles irréductibles, assiégés depuis deux ans par les troupes gouvernementales, a commencé à quitter mercredi la Vieille ville de Homs, un succès pour le régime syrien à un mois de la réélection attendue de Bachar al-Assad.

L'évacuation d'au moins 1200 combattants, civils et blessés de Homs - autrefois surnommée par les militants la «capitale de la révolution», car elle fut le théâtre des plus grandes manifestations contre le régime à partir de mars 2011 - s'inscrit dans le cadre d'un accord sans précédent entre belligérants, conclu à l'issue de deux mois de négociations.

Les rebelles peuvent se targuer de quitter Homs la tête haute, sans être humiliés, mais le régime engrange une importante victoire symbolique dans une ville qui l'avait défié et où débuta la rébellion armée.

L'évacuation a commencé à 10 h (3 h, heure de Montréal) dans des bus dont les vitres étaient recouvertes de papier. «Jusqu'à présent, 400 personnes ont quitté l'enclave assiégée», a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Pour sa part, le gouverneur Talal al-Barazi a indiqué que trois convois étaient partis. «Si c'est possible, un quatrième partira ce soir et l'opération se poursuivra jeudi», a-t-il dit, sans donner de chiffres sur le nombre de personnes évacuées.

Les convois sont dirigés vers Dar al-Kabira, une ville rebelle à une vingtaine de kilomètres plus au nord, puis les hommes sont répartis dans d'autres endroits.

Une vidéo, diffusée par les rebelles, montre des hommes, avec des sacs à dos, coiffés de casquette ou cagoulés, leur fusil mitrailleur en bandoulière, montant dans deux bus.

Dans une autre vidéo, un 4X4 de l'ONU est positionné devant les bus avec des hommes en treillis portant des gilets pare-balles sur lesquels est écrit «Police».

Sur Facebook, l'ancien joueur de soccer Abdel Basset al-Sarout, devenu une icône de la révolte à Homs, a posté la photo de rebelles en train de pleurer, alors que lui-même devait quitter la ville dans un des convois.

«Avec la sortie de ces hommes armés, l'opération de réconciliation va commencer pour que Homs soit une ville débarrassée des armes et des hommes armés. Nous travaillons pour que l'opération s'applique à tous les quartiers de Homs», a déclaré le gouverneur à l'agence officielle Sana, faisant allusion à celui de Waër, où se trouvent des centaines de milliers de personnes, dont de nombreux déplacés.



«Envie de pleurer»

Le président Assad, cité par la télévision officielle, a affirmé que «l'État soutient le processus de réconciliation nationale dans toutes les régions, car il souhaite arrêter le bain de sang et parce qu'il considère que la solution de la crise ne peut pas venir de l'extérieur, mais des Syriens eux-mêmes».

Mais pour Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH, ce qui s'est passé est «surtout une défaite pour la communauté internationale» : «il y a eu une résistance légendaire malgré deux ans de siège et en dépit de tout ceci, la communauté internationale n'a rien fait».

«C'est une victoire médiatique pour le régime, car Homs occupait une place symbolique dans la révolution syrienne», a-t-il ajouté.

Durant les deux ans de siège, près 2200 personnes sont mortes dans la Vieille ville, selon l'OSDH. Dans le centre historique, totalement en ruines, les irréductibles n'avaient quasiment plus rien à manger, se nourrissant souvent d'herbes et de quelques aliments séchés.

«J'ai énormément de peine et envie de pleurer. J'ai l'impression que mon âme a quitté mon corps en quittant Homs», a confié un rebelle à un militant de Dar al-Kabira, Wael. Ce dernier a indiqué à l'AFP que les arrivants étaient affamés.

Les rebelles n'occupaient plus que 2 km2 sur les 40 que compte la troisième ville du pays. C'est à Homs que la violence confessionnelle avait atteint son paroxysme avec une série de meurtres et représailles entre communautés.

Par ailleurs, selon l'OSDH, deux villages chiites de la province d'Alep, Naboul et Zahra, encerclés par les rebelles, ont pu recevoir de la nourriture en application de l'accord, qui prévoit également la libération d'otages retenus par les rebelles.

«Il y en a 36, tous des combattants qui seront libérés en échange de la levée du siège de Homs», a affirmé un rebelle du Front islamiste d'Alep. «Quinze, tous Syriens, ont déjà été libérés. Nous avons aussi 11 Iraniens et des Libanais (...) qui seront libérés au fur et à mesure de l'opération».