Un deuxième candidat s'est présenté jeudi à l'élection présidentielle controversée en Syrie, pays ravagé par la guerre où 27 civils ont péri dans un nouveau raid aérien de l'armée sur la province d'Alep selon une ONG.

Alors que l'élection du 3 juin doit aboutir sans surprise à la réélection du président Bachar al-Assad, le scrutin a été qualifié par l'opposition et l'Occident de «farce» et de «parodie de la démocratie».

Avec plus de 150 000 morts en trois ans selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), plus de neuf millions de réfugiés et déplacés et des régions entièrement détruites, le conflit en Syrie semble s'éterniser, aucun des protagonistes ne parvenant à prendre le dessus sur le terrain malgré des avancées de l'armée.

Déclenché en mars 2011 par une contestation populaire violemment réprimée, ce conflit s'est transformé en une guerre opposant forces du régime à des déserteurs aidés par des civils armés et des jihadistes venus de l'étranger. Le conflit est devenu plus complexe avec les combats entre rebelles et jihadistes, bien que tous soient engagés contre le régime.

Malgré ce contexte de violences, le régime a décidé d'organiser la présidentielle dans les temps.

Hassan al-Nouri, homme d'affaires et membre d'une formation de l'opposition de l'intérieur tolérée par le pouvoir, est devenu le deuxième postulant, après le député ex-communiste Maher al-Hajjar, pour cette première présidentielle tenue depuis l'accession du parti Baas au pouvoir en Syrie il y a un demi-siècle.

Ce scrutin exclut néanmoins de facto les opposants en exil et se tiendra dans les zones tenues par le régime soit, selon le géographe français Fabrice Balanche, 40% du territoire sur lesquels vivent plus de 60% de la population.

Bachar al-Assad n'a pas encore annoncé officiellement sa candidature. Mais il a affirmé en janvier à l'AFP qu'il y avait «de fortes chances» qu'il se représente.

La nouvelle Constitution approuvée en 2012 donne pour la première fois la possibilité à plusieurs candidats de se présenter à la présidentielle. Le futur président doit avoir vécu en Syrie de manière continue ces 10 dernières années, et tout candidat doit obtenir le soutien d'au moins 35 des 250 députés au Parlement acquis au régime.

Jusqu'à présent, Bachar al-Assad -candidat unique comme son père Hafez précédemment- avait été choisi par référendum.

Violences sanglantes

Parallèlement aux préparatifs du scrutin, le régime tente de reprendre des secteurs clés aux rebelles qu'il présente comme des «terroristes».

À Atareb, une localité de la province d'Alep, au moins 27 civils, dont trois enfants, ont été tuées dans un raid aérien sur un marché, selon l'OSDH. L'armée intensifie depuis décembre ses attaques contre les positions rebelles dans la métropole d'Alep et sa province faisant au total des centaines de morts, en majorité des civils.

Des militants ont diffusé des vidéos montrant des scènes de chaos à Atareb avec des corps gisant dans les gravats, une femme poussant des cris à côté du corps inanimé d'un parent et un homme penché sur un enfant à la jambe arrachée par le bombardement.

Ailleurs dans la province d'Alep, l'armée a mené des raids aériens tuant douze civils dont quatre enfants et lancé des barils d'explosifs sur des quartiers tenus par les rebelles, selon l'OSDH.

Dans la province de Deraa (sud), au moins 22 rebelles islamistes et un nombre indéterminé de soldats ont péri dans les combats, a ajouté l'ONG.

Human Rights Watch a accusé le régime de «provoquer un désastre» avec ses raids sur les secteurs rebelles.

Le patron de l'ONU Ban Ki-moon a dénoncé le fait que l'accès humanitaire pour ceux qui ont le plus besoin de secours «ne s'améliore pas», jugeant «honteux» que près de 250 000 personnes restent prises au piège des combats.

Sur une note moins négative, la Syrie s'est rapprochée un peu plus de l'évacuation totale des armes chimiques qu'elle dit posséder, plus de 90% d'entre elles ayant désormais quitté le pays, selon la mission internationale chargée de superviser ce processus.

«La Syrie gagne du temps, elle sait que tant que le processus de destruction des armes chimiques est en cours, la communauté internationale ne l'embêtera pas trop», estime Sico van der Meer, analyste en armes chimiques de l'Institut Clingendael de La Haye. «Ils vont achever l'évacuation, certes, mais la question des sites de production est toujours sur la table».