Les discussions entre opposition et gouvernement syriens menées par le médiateur de l'ONU Lakhdar Brahimi étaient totalement bloquées vendredi à Genève, un appel aux parrains russes et américains de la Conférence n'ayant produit aucun effet.

En Syrie le même jour, au moins 47 personnes dont 14 combattants rebelles ont été tuées dans un attentat à la voiture piégée devant une mosquée d'une localité tenue par les rebelles dans la province de Deraa (sud), a rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

À Alep (nord), des rebelles ont fait exploser des mines sous l'hôtel Carlton, faisant au moins 18 morts parmi les soldats et miliciens qui y étaient positionnés. De violents combats ont ensuite opposé les soldats soutenus par des miliciens aux rebelles, faisant des morts chez ces derniers selon l'OSDH, qui n'était pas en mesure de donner de bilan dans l'immédiat.

À Genève, plus que jamais les positions sont fondamentalement opposées, la seule note commune étant le constat que l'impasse est totale.

«Malheureusement, cette discussion n'a accompli aucun progrès», a affirmé le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Faisal Mokdad.

Le porte-parole de la délégation de l'opposition, Louai Safi, énonce la même conclusion. «À ce jour les négociations sont dans l'impasse comme vous le savez tous», a-t-il dit aux journalistes.

L'un comme l'autre n'ont donné aucune indication quant à la suite des pourparlers.

Le vice-ministre syrien a répété que pour le gouvernement, la lutte contre «le terrorisme» demeure la priorité. «Ceux qui ne veulent pas combattre le terrorisme ne font définitivement pas partie du peuple syrien», a-t-il affirmé. «Ceux qui portent des armes contre leur peuple et leur gouvernement sont des terroristes», a-t-il dit.

«Nous n'avons pas de problème pour discuter du terrorisme initié par le régime (...) mais sans une autorité gouvernementale de transition, on n'aboutira à rien», a répété pour sa part le représentant de l'opposition, soulignant que sa délégation a présenté jeudi un document écrit sur les missions d'une telle autorité. La délégation du gouvernement n'a même pas voulu le prendre.

Il a rappelé que le document présenté prévoit le départ «de Syrie de tous les combattants étrangers», un objectif qui vise aussi bien les miliciens libanais du Hezbollah venus aider le régime, que les jihadistes étrangers que désormais l'opposition combat.

Russes et Américains sollicités

«Des discussions pour la galerie n'ont pas de sens», a estimé un haut responsable américain, pour qui le conflit doit être réglé au niveau politique et pas sur le champ de bataille.

«Nous pensons que la Russie a la responsabilité de faire pression sur le régime syrien pour qu'il aborde ces discussions avec sérieux», a-t-il ajouté sous couvert d'anonymat.

Les parrains russe et américain de la Conférence s'étaient réunis jeudi avec M. Brahimi pour essayer de débloquer la situation puis les représentants russes avaient vu les deux délégations, ne provoquant aucun changement notable.

Jeudi soir un responsable de l'opposition, Bader Jamous, secrétaire général de la Coalition, s'était déclaré insatisfait après une rencontre avec les diplomates russes, à qui il a reproché de reprendre à son compte la priorité du régime, la lutte contre la violence et le terrorisme.

Le responsable américain a salué «le travail extraordinaire» accompli par la délégation de l'opposition, «apportant des solutions constructives sur la table, y compris ce plan très détaillé sur l'autorité gouvernementale de transition».

L'impasse dans les discussions rend les diplomates plus pessimistes. «On s'attendait à ce que les discussions soient difficiles. Mais on ne s'attendait pas à ce qu'ils soient incapables de trouver un compromis sur un calendrier, et ça franchement, ça n'est pas bon», estime un diplomate occidental, qui comme d'autres collègues envisage maintenant que le médiateur puisse déclarer forfait.

En Syrie, plus de 2700 habitants de la région montagneuse du Qalamoun ont fui les raids aériens et les combats, pour le village libanais d'Aarsal, a indiqué le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Depuis trois jours, l'armée syrienne attaque les positions rebelles dans et autour de Yabroud, la plus grande ville du Qalamoun, une situation qui a suscité la préoccupation du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU vendredi.

«Nous sommes profondément inquiets de la possibilité que l'attaque de Yabroud suive le schéma des précédentes attaques des villes et villages à travers la Syrie», qui ont eu pour résultats «de lourdes pertes civiles», a déclaré Rupert Colville, porte-parole de la Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme.

M. Colville a pointé des rapports faisant état d'une augmentation des raids aériens et du pilonnage de la ville, et d'une préparation militaire qui suggère qu'un assaut important se préparait.