Des pays occidentaux ont salué la décision «courageuse» de l'opposition syrienne de se rendre en Suisse pour négocier avec le régime, mais les objectifs des deux camps semblent inconciliables, l'opposition martelant que son seul but est de se débarrasser d'Assad.

La Russie, fidèle soutien du régime, s'est également félicitée de la décision de la Coalition de l'opposition syrienne, qui a accepté samedi à Istanbul, après des semaines d'atermoiements et de pression occidentales et arabes, de participer à la conférence de paix de Genève II qui s'ouvre mercredi.

Les chefs de la diplomatie française, Laurent Fabius, et américaine, John Kerry, ont qualifié cette décision de «courageuse».

«En dépit des provocations et des exactions du régime», ce choix «est celui de la recherche de la paix», a déclaré M. Fabius.

«Nous savons tous que le processus sera difficile, mais je dis au peuple syrien : nous nous tiendrons à vos côtés», a assuré John Kerry.

Berlin a souligné que «le moindre progrès (...) sur le passage des convois humanitaires ou des accords de cessez-le-feu au niveau local, serait un succès».

L'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont salué la décision dans un communiqué conjoint, insistant sur le «droit du peuple syrien à (...) se défendre contre les crimes du régime». Les deux pays ont réitéré leur position en faveur d'un départ de Bachar al-Assad.

«C'est la bonne décision, nous avons toujours dit qu'il fallait aller à ce forum et entamer un dialogue avec le gouvernement», a déclaré pour sa part le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov.

L'Iran, principal allié régional de Damas et qui n'est pas invité à la conférence, prône de son côté une approche «réaliste de la crise en Syrie» lors de cette réunion, selon les médias iraniens.

Et Londres a rappelé que tout accord exigerait que le président Bachar al-Assad quitte le pouvoir.

Le régime a pourtant maintes fois répété qu'il ne comptait pas «remettre le pouvoir à qui que ce soit» lors de Genève II.

Les deux parties arriveront donc avec des objectifs diamétralement opposés à ce rendez-vous diplomatique lancé à l'initiative des États-Unis et de la Russie pour trouver une solution politique à ce conflit qui a fait plus de 130 000 morts en près de trois ans.

Convaincre la rébellion

Outre un nouvel appel au départ du «boucher» Assad, le président de la Coalition de l'opposition, Ahmad Jarba, a accusé le régime de faire du «terrorisme d'État», affirmant qu'il était responsable de la présence sur le terrain des combattants de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL), liés à Al-Qaïda, que des combats meurtriers opposent actuellement aux rebelles.

Le chef de l'EIIL Abou Bakr al-Baghdadi a d'ailleurs tendu la main à ses anciens alliés, dans un message audio diffusé sur des forums jihadistes, les appelant à mettre fin à ces affrontements pour se «concentrer sur les combats» contre le régime syrien.

M. Jarba a aussi prévenu que la participation à la conférence ne signifiait pas la fin des opérations contre les forces d'Assad menées par l'opposition et sa branche armée, l'Armée syrienne libre (ASL).

La Turquie et le Qatar, mandatés par l'ensemble des parrains occidentaux et arabes de l'opposition, ont réuni vendredi et samedi à Ankara quatre groupes de combattants rebelles, dont le Front islamique, pour les convaincre de l'utilité de Genève II, a-t-on appris de source diplomatique. Au moins trois de ces groupes, qui ne font pas partie de la Coalition, ont donné leur accord pour intégrer la délégation de l'opposition en Suisse.

Sous l'influence de Moscou, le régime syrien avait fait vendredi une série de concessions humanitaires, proposant un «échange de prisonniers» et un plan de cessez-le-feu dans la région d'Alep (nord).

Première manifestation des promesses du régime : de l'aide alimentaire est entrée et des civils ont été évacués du camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, à Damas, assiégé par l'armée depuis des mois.

Les combats se sont cependant poursuivis dimanche faisant 30 morts, dont 15 tués par des bombardements aux barils d'explosifs dans la région d'Alep, rapporte l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

«Un pas historique», dit Ban Ki-moon

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a salué dimanche la décision de l'opposition syrienne en exil.

«C'est un pas courageux et historique dans l'intérêt d'une solution politique négociée à un conflit vieux de trois ans et qui a déjà causé tant de malheur et de destruction», a souligné M. Ban dans un communiqué.

«J'attends avec impatience la formation par l'opposition (syrienne) d'une délégation qui représente pleinement toute la diversité de l'opposition syrienne, y compris les femmes», a ajouté le secrétaire général, qui a lui-même convoqué cette conférence de paix