Les quinze pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont adopté mercredi une déclaration unanime qui exige de Damas un meilleur accès humanitaire en Syrie face à «l'ampleur de (la) tragédie humanitaire».

Le Conseil demande aux autorités syriennes de «prendre immédiatement des mesures» pour lever les obstacles à la livraison de l'aide, et pour autoriser notamment les convois d'aide de l'ONU venant de pays voisins à passer la frontière.

Des ONG utilisent déjà cet itinéraire, passant notamment par la Turquie.

La Russie, alliée du régime de Bachar al-Assad, était réticente à cet accès transfrontalier, car l'aide parvient alors directement à des zones frontalières tenues par l'opposition dans le nord et l'est du pays. Mais elle n'a pas bloqué cette «déclaration présidentielle», moins contraignante qu'une résolution.

Si cette déclaration est pleinement appliquée, «nous serons en mesure d'atteindre deux millions de personnes supplémentaires que nous ne pouvons pas atteindre depuis des mois», s'est félicitée la chef des opérations humanitaires de l'ONU Valerie Amos. «Nos opérations vont aussi pouvoir être accélérées», a-t-elle ajouté en rappelant que «l'hiver approche».

Le Conseil presse Damas «de prendre immédiatement des mesures pour faciliter l'extension des opérations de secours humanitaire et de lever les difficultés bureaucratiques et autres obstacles», notamment en délivrant des autorisations à des ONG supplémentaires et des visas.

Elle demande aux autorités de faciliter l'importation de «moyens de communication, véhicules blindés et équipements médicaux et chirurgicaux».

Cinq millions de Syriens ont été déplacés ou exilés par la guerre, mais, selon l'ONU, le gouvernement syrien a réduit les visas pour les agences et ONG humanitaires et mis des conditions strictes à la livraison d'aide aux zones contrôlées par l'opposition.

Le Conseil demande «un accès libre et sécurisé à la population qui a besoin d'aide par les moyens les plus efficaces, y compris en franchissant les lignes de front et, quand cela se justifie, les frontières avec les pays voisins».

Il se déclare «consterné par le niveau croissant et inacceptable de la violence et par la mort de plus de 100 000 personnes en Syrie».

Il «condamne les nombreuses violations des droits de l'homme (..) commises par les autorités syriennes», de même que par des «groupes armés», en référence à l'opposition.

Il «condamne» également les «attentats terroristes de plus en plus nombreux» commis par des groupes liés à Al-Qaïda. Les responsables d'exactions en Syrie «doivent être traduits en justice», affirme la déclaration, mais elle ne fait pas référence à la Cour pénale internationale, habilitée à statuer sur de tels crimes.

Le Conseil presse enfin les donateurs de se montrer plus généreux pour «répondre aux besoins croissants» en Syrie et dans les pays voisins qui accueillent des réfugiés. L'appel humanitaire de l'ONU pour la Syrie n'a été financé pour l'instant qu'à 44 %, ce qui laisse un trou de 3 milliards de dollars. Selon des diplomates, l'ONU veut convoquer une nouvelle conférence des donateurs en janvier prochain au Koweït.

La déclaration avait été proposée par le Luxembourg et l'Australie. Elle a profité de l'élan donné par l'adoption, vendredi dernier par le Conseil, de sa première résolution sur la Syrie depuis le début du conflit en mars 2011, qui autorise la destruction des armes chimiques syriennes.

Pour l'ambassadeur australien Gary Quinlan, le Conseil se devait d'agir face à une «catastrophe humanitaire sans précédent». La guerre en Syrie «crée un réfugié toutes les 15 secondes», a-t-il dit.

Les acteurs humanitaires pourront désormais s'appuyer sur l'autorité du Conseil, a souligné l'ambassadrice luxembourgeoise Sylvie Lucas, pour qui cette déclaration, «très concrète, envoie un message fort et uni».

L'ambassadeur syrien Bachar Jaafari a indiqué à la presse que Damas allait «étudier cette déclaration». Il s'est félicité que la déclaration dénonce «les groupes terroristes opérant» en Syrie.