Le président syrien Bachar al-Assad a condamné l'attentat suicide ayant tué un célèbre dignitaire religieux sunnite favorable au régime et 48 autres personnes à Damas, s'engageant à «nettoyer» le pays des extrémistes.    

«Je présente mes condoléances au peuple syrien pour le martyr de cheikh Mohammad Saïd al-Bouti, ce grand personnage de la Syrie et du monde islamique», a dit M. Assad dans un message publié dans la nuit de jeudi à vendredi par les médias officiels.

Dans une lettre à l'ONU, le ministère syrien des Affaires étrangères a demandé au Conseil de sécurité de «condamner ce crime terroriste et d'envoyer un message clair affirmant que la communauté internationale est déterminée à lutter contre le terrorisme».

Le chef de l'opposition syrienne Ahmed Moaz al-Khatib a condamné l'attaque en disant soupçonner le régime d'être derrière l'attentat commis jeudi soir dans la mosquée al-Imane dans le quartier de Mazraa, où cheikh Bouti avait l'habitude de donner des cours de religion les lundis et jeudis.

Mais des manifestants antirégime ont conspué vendredi ce dignitaire religieux. «Que ton âme soit damnée Bouti», scandaient certains à Idleb (nord) alors que d'autres dans la région de Homs promettaient un sort identique au mufti sunnite de Syrie, lui aussi proche du pouvoir, cheikh Ahmad Badreddine Hassoune, qui avait appelé à soutenir l'armée régulière. «Ton tour viendra Hassoune» criaient certains à Talbissé.

Les funérailles de dignitaire religieux auront lieu samedi après la prière de midi à la mosquée des Ommeyades, l'un des lieux les plus prestigieux de Damas. Les autorités ont décrété un jour de deuil national en Syrie, selon l'agence officielle Sana.

L'attentat n'a pas été revendiqué, mais son mode opératoire - un kamikaze actionnant une ceinture d'explosifs - rappelle celui du réseau extrémiste Al-Qaïda notamment en Irak.

Cette explosion a été particulièrement meurtière: 49 morts selon le ministre de la Santé et 52 selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Une source des services de sécurité à Damas a affirmé à l'AFP que cheikh al-Bouti refusait toute protection, affirmant qu'il remettait sa vie dans les mains de Dieu. Il était aussi hostile à toute fouille par la police des fidèles venus écouter ses sermons.

«Ils t'ont tué croyant faire taire la voix de l'islam et la foi dans le pays (...), ils t'ont tué pour avoir élevé la voix face à leurs idées obscurantistes visant à détruire les principes de notre religion clémente», a indiqué M. Assad dans son message.

«Je jure au peuple syrien que ton sang, celui de ton petit-fils et de tous les martyrs de la patrie n'aura pas coulé gratuitement, car nous serons fidèles à tes idées en anéantissant leur obscurantisme et leur incroyance jusqu'à ce que nous en nettoyons le pays», a-t-il poursuivi.

Le secrétaire général de la Ligue arabe Nabil al-Arabi, a dénoncé «l'attaque terroriste» à Damas et a insisté sur «la nécessité de capturer rapidement les auteurs de ce crime haineux».

Membre d'une grande tribu kurde à cheval entre la Syrie, la Turquie et l'Irak, M. Bouti, né en 1929, était titulaire d'un doctorat de sciences islamiques de l'Université Al-Azhar du Caire.

Honni par l'opposition largement sunnite, il avait même été chassé d'une mosquée à Damas en juillet 2011 pour avoir déclaré: «la majorité des gens qui viennent aux prières du vendredi puis qui sortent ensuite manifester (contre le régime) ne connaissent rien à la prière».

Dans un prêche du vendredi ce mois-ci, il avait assuré que la charia (loi musulmane) impliquait que «tous ceux qui peuvent rejoindre l'armée le fassent et ceux qui sont dans l'incapacité de le faire «aident l'armée selon leurs moyens».

L'Iran, principal allié régional du régime syrien, a dénoncé «le complot des États-Unis, du régime sioniste et de leurs agents régionaux qui aident et arment les groupes terroristes syriens pour créer des divisions inter-religieuses».

Vendredi, les combats entre rebelles et soldats continuaient de faire rage en Syrie en proie à la guerre depuis deux ans, alors que le chef de l'ONU Ban Ki-moon a annoncé le lancement d'une enquête sur un éventuel recours aux armes chimiques dans le pays après des accusations réciproques des belligérants.

Les violences ont fait vendredi à la mi-journée 38 morts, dont 17 civils et 21 blessés selon l'OSDH, alors que le conflit a fait plus de 70 000 morts depuis le début mi-mars 2011.