Filmer les bombardements, photographier la destruction, recueillir les témoignages des victimes: tel était le quotidien d'Omar Shakir lorsqu'il était en Syrie. Aujourd'hui réfugié au Liban, il continue sans relâche à récolter de l'information. Sa mission: raconter au monde entier la répression du régime de Bashar al-Assad.

Lorsqu'il n'est pas en train d'écrire des articles pour alimenter ses pages Facebook, Omar Shakir, ancien étudiant en génie civil, guide les journalistes étrangers dans la communauté de réfugiés et de militants syriens de Tripoli.

Pour lui comme pour des centaines d'autres, la guerre a fait naître une vocation. Pendant presque un an, alors qu'il était toujours en Syrie, Omar documentait la révolution et le quotidien des civils de ce pays pris dans un conflit.

À l'été 2011, une quinzaine d'autres jeunes hommes et lui ont mis leurs économies en commun et créé le centre des médias de Homs. «Nous passions tout notre temps à photographier, filmer et diffuser nos vidéos sur YouTube et Facebook. Je documentais également les cas de viols et de torture pour le bureau de Human Rights Watch à Beyrouth», raconte-t-il.

Il faut dire qu'avec la télévision d'État syrienne accusée de désinformation et de propagande pro-Assad et un accès au pays extrêmement difficile pour les médias étrangers, les journalistes citoyens se sont imposés comme l'une des principales sources d'information du conflit.

Une occupation dangereuse

Ces nouveaux journalistes, qui oeuvrent dans la clandestinité, couvrent cependant la révolte au péril de leur vie. À preuve, Omar a perdu sept de ses anciens confrères du centre des médias.

Depuis son arrivée au Liban en mars, Omar ne relâche pas la garde. Par précaution, il a préféré élire domicile à Tripoli plutôt que dans la capitale, qui compte une forte présence d'alliés du régime de Damas tel que le Hezbollah.

Pour éviter de se faire repérer trop facilement, l'apprenti journaliste a changé huit fois d'appartement en moins d'un an. «Un de mes collègues s'est déjà fait arrêter deux fois et a même été victime d'une tentative d'assassinat. Depuis, je suis encore plus prudent», raconte-t-il.

Sans relâche, il continue à récolter l'information à partir du Liban. Ultimement, il espère décrocher une bourse pour intégrer un programme de journalisme au sein d'une université libanaise, mais ses chances sont minces.

«Je voulais étudier le journalisme à l'Université arabe à Tripoli, mais ça n'a pas été possible parce que je n'ai pas pu fournir les documents nécessaires. J'ai tout perdu dans la guerre», dit-il.

Pour ces apprentis journalistes, dont le seul crime est d'avoir été témoin des exactions commises dans cette répression sanglante, le prix à payer est élevé.

Selon Reporters sans frontières, au moins 54 journalistes citoyens ont péri depuis le début du conflit. Omar, lui, est pratiquement sans nouvelles de sa famille depuis qu'il a fui la Syrie clandestinement.

Mais le jeune homme est déterminé à continuer son travail. Il y a tout juste deux ans, critiquer le régime syrien de Bachar al-Assad était presque impensable, aujourd'hui Omar rêve de devenir journaliste.