Un journaliste franco-belge de 58 ans a été tué, selon des militants, par l'armée dans le Nord syrien également en proie à de violents combats entre djihadistes et combattants kurdes de Syrie qui se disputent un point de passage vers la Turquie.

Le journaliste français d'origine belge Yves Debay a été abattu jeudi par un tireur embusqué alors qu'il effectuait un reportage à Alep dans le nord de la Syrie, où au moins 17 journalistes professionnels, étrangers et Syriens, et 44 citoyens-journalistes ont été tués en 22 mois, selon Reporters Sans Frontières.

Il a été tué près de la prison centrale à la lisière nord de la métropole où de violents combats opposaient rebelles et soldats, a affirmé l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Des photos et vidéos montrant son cadavre avec une trace de balle dans la tête ainsi que son accréditation de presse auprès du ministère français de la Défense ont été mises en ligne par des militants anti-régime qui ont accusé les troupes régulières d'être responsables de sa mort.

«Il a été tué sur un des fronts d'Alep» jeudi, «abattu par un tireur embusqué du régime», a affirmé le centre de presse des militants anti-régime d'Alep.

Un militant a rapporté à l'AFP sous le couvert de l'anonymat avoir transporté le corps du journaliste défunt dans une ambulance se rendant au poste-frontière de Bab al-Salama vers la Turquie.

«Les circonstances exactes de sa mort ne sont pas encore claires, mais il semble qu'il soit entré dans une rue extrêmement dangereuse où étaient positionnés des membres de l'armée et des milices du régime», a-t-il ajouté.

M. Debay travaillait pour Assaut, une revue spécialisée qu'il avait fondée il y a cinq ans.

Personnalité haute en couleurs, né au Congo belge en 1954, il avait servi un temps dans l'armée belge, avant de se reconvertir en mercenaire, oeuvrant au sein de l'ex-armée rhodésienne, les services de sécurité du régime blanc au pouvoir jusqu'en 1980 dans ce qui est devenu le Zimbabwe.

Combats près de la Turquie

À plusieurs centaines de kilomètres à l'est d'Alep, des combats d'une violence sans précédent opposaient combattants kurdes syriens à 300 combattants islamistes venus de la Turquie près du poste-frontière de Rass al-Aïn tenu par les rebelles, selon l'OSDH.

«Des membres de groupes armés liés au Front (djihadiste) Al-Nosra ont traversé la frontière turque avec trois chars pour entrer dans Rass al-Aïn» jeudi, a indiqué à l'AFP un militant anti-régime, se faisant appeler Havidar.

Les Kurdes sont parvenus à prendre vendredi l'un de ces chars au Front al-Nosra, récemment placé par Washington sur sa liste des groupes terroristes pour liens présumés avec Al-Qaïda, a-t-il ajouté.

Selon Mohammed, un habitant de Rass al-Aïn, «les combattants kurdes ont reçu (jeudi après-midi) des renforts pour faire face à l'assaut le plus violent lancé par les rebelles depuis leur arrivée dans la ville» en novembre.

Depuis le début du conflit, les Kurdes cherchaient à rester à l'écart de la guerre, mais ils ont été accusés par les rebelles de faire le jeu du régime dont les troupes se sont retirées sans résistance de plusieurs régions kurdes.

Des combattants du Parti de l'Union démocratique kurde (PYD), la branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, rebelles kurdes de Turquie), ont maintes fois combattu Al-Nosra et Ghouraba al-Cham à Rass Al-Aïn.

Des militants disent craindre que la Turquie, qui soutient les rebelles, n'utilise les groupes djihadistes en Syrie dans son combat contre les Kurdes.

Le journaliste et militant kurde syrien Massoud Akko s'est dit «inquiet face aux combats entre miliciens kurdes et rebelles. Si le combat se transforme en lutte entre Kurdes et Arabes, cela mettra en danger la Syrie et la révolte» contre M. Assad.