Les rebelles syriens ont remporté vendredi une importante victoire en s'emparant du plus grand aéroport militaire du nord du pays au moment où Russes, Américains et le médiateur international Lakhdar Brahimi se réunissaient à Genève pour chercher une solution au conflit.

«Les combats dans l'aéroport militaire de Taftanaz ont cessé vers 11 h (4 h à Montréal) et cette base est totalement aux mains des insurgés. Il y a beaucoup de morts parmi les forces du régime. Une grande partie des soldats et des officiers ont fui à l'aube», a déclaré à l'AFP le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.

«Il s'agit de la prise de la plus importante base aérienne depuis de début de la révolte il y a 22 mois. Elle a été conquise par le Front al-Nosra, Ahrar al-Cham et Taliaa al-Islamiya», trois groupes radicaux islamistes, a-t-il précisé. Dans le passé, les rebelles avaient conquis deux aéroports de moindre importance, près de Bou Kamal (est) et dans la région de Damas.

Selon M. Abdel Rahmane, «le régime a toutefois réussi à déplacer vers la ville d'Idlib (à 20 km au sud-ouest de Taftanaz) un grand nombre de véhicules militaires, mais une partie est tombée aux mains des rebelles».

Tenue par les forces du régime, la ville d'Idlib compte deux aéroports militaires dans sa périphérie, Taftanaz et Abou al-Zouhour, toujours aux mains de l'armée.

Taftanaz peut accueillir en temps normal 60 hélicoptères, mais le régime les a tous retirés à l'exception d'une vingtaine inutilisables, selon l'OSDH, une ONG qui s'appuie sur un large réseau de militants et de médecins en Syrie.

Peu après la capture de la base, l'aviation du régime bombardait les pistes et les bâtiments pour les rendre inutilisables, selon l'OSDH.

Dans un communiqué, Ahrar al-Cham affirme que «la prise de l'aéroport ouvre la porte à la libération de toute la province d'Idlib, car il s'agit du plus grand aéroport d'hélicoptères du nord de la Syrie et le deuxième en importance pour les hélicoptères de toute la Syrie».

Cette organisation a posté trois vidéos dans lesquelles on voit notamment des rebelles scandant «Allah Akbar» devant trois chars et des caisses de munitions.

Une source militaire loyaliste avait affirmé à l'AFP dans la matinée que les rebelles contrôlaient la majorité de l'aéroport.

Des réfugiés pieds nus dans le froid

Pendant ce temps à Genève, le secrétaire d'État adjoint américain William Burns et le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhail Bogdanov se retrouvaient avec M. Brahimi au siège des Nations unies.

Moscou affirme que le règlement du conflit passe par un dialogue entre le pouvoir et l'opposition, sans conditions préalables, contrairement aux rebelles et aux Occidentaux qui réclament le départ du président Bachar al-Assad.

Cette réunion intervient alors que la Syrie a accusé jeudi M. Brahimi d'être «partial» en faveur «des cercles (conspirant) contre la Syrie», sans toutefois lui fermer la porte.

M. Brahimi a estimé que le plan de sortie de crise présenté dimanche par le chef de l'État syrien était «encore plus sectaire et partial» que les précédents.

Sur le terrain, les militants de l'opposition ont appelé, comme tous les vendredis, à des manifestations. Cette semaine, ils veulent dénoncer «les camps de la mort», en référence aux souffrances des réfugiés syriens dans les pays voisins qui souffrent des terribles conditions climatiques de ces derniers jours.

«Beaucoup de réfugiés hébergés ou non dans des camps sont confrontés au froid et à l'humidité. Beaucoup de ceux qui arrivent sont pieds nus, avec des vêtements couverts de boue et de neige», a déclaré à Genève le porte-parole du Haut-commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR), Adrian Edwards.

M. Edwards a en outre affirmé que le nombre de réfugiés syriens enregistrés dans les pays voisins et en Afrique du Nord avait dépassé les 600 000.

Selon l'ONU, plus de 60 000 personnes ont péri depuis le début, en mars 2011, d'une révolte populaire contre le régime de Bachar al-Assad qui s'est militarisée au fil des mois sous le coup de la répression du régime.