L'émissaire Lakhdar Brahimi a appelé jeudi à un changement «réel» en Syrie et à la formation d'un gouvernement de transition ayant les pleins pouvoirs avant la tenue d'élections pour sortir du conflit qui a fait plus de 45 000 morts en 21 mois.

«Le changement réclamé ne doit pas être cosmétique, le peuple syrien a besoin et réclame un changement réel, et tout le monde comprend ce que cela veut dire», a déclaré l'envoyé spécial de l'ONU et de la Ligue arabe lors d'une conférence de presse à Damas.

«Il faut former un gouvernement ayant tous les pouvoirs (...) qui assumera le pouvoir pendant la période de transition. Cette période transitoire prendra fin avec des élections», a-t-il ajouté.

Il n'a toutefois pas précisé d'échéance pour ces élections qui pourront être «soit présidentielles s'il y a accord pour conserver un régime présidentiel, soit (seulement) parlementaires s'il y a accord pour un changement vers un régime parlementaire».

«La période de transition ne doit pas conduire à l'effondrement de l'Etat et de ses institutions», a-t-il insisté.

Des élections parlementaires ont eu lieu en mai 2012 pour un mandat de quatre ans et le mandat du président Bachar al-Assad doit s'achever en 2014.

«À l'heure actuelle, nous ne présentons pas un projet complet, nous préférons soumettre un projet auquel les parties auront donné leur accord afin d'en faciliter l'application. Et si cela ne se fait pas, la dernière solution reste d'aller au Conseil de sécurité qui prendra une résolution contraignante», a-t-il encore dit.

Le Conseil de sécurité n'est jusqu'ici pas parvenu à prendre une résolution de ce type, Moscou et Pékin, grands alliés du régime syrien, usant de leur droit de veto pour bloquer toute résolution le condamnant.

M. Brahimi a démenti la mise au point d'un plan russo-américain de règlement du conflit en Syrie, dont la Russie a également nié l'existence.

Les Russes et les Américains «se sont réunis à mon initiative (...) on a dit en Syrie et hors de Syrie que j'avais proposé un accord américano-russe, j'aurais aimé qu'il y ait un accord américano-russe», a affirmé M. Brahimi, ajoutant que ce n'était pas le cas.

Le 6 décembre, M. Brahimi avait rencontré à Dublin la chef de la diplomatie américaine Hillary Clinton et son homologue russe Sergueï Lavrov. Trois jours plus tard, des dirigeants des deux pays s'étaient à nouveau rencontrés en présence de M. Brahimi.

Le médiateur nommé en septembre a une nouvelle fois évoqué l'accord sur les principes d'une transition, adopté le 30 juin à Genève par le Groupe d'action sur la Syrie. Pour lui, il y a dans ce texte «suffisamment d'éléments pour négocier une sortie de crise au cours des prochains mois».

Les membres de ce Groupe divergent toutefois sur l'interprétation de cet accord qui ne contient aucun appel à M. Assad à renoncer au pouvoir. Les États-Unis estiment qu'il ouvre la voie à l'ère «post-Assad», tandis que la Russie et la Chine affirment qu'il revient aux Syriens de déterminer leur avenir.

Alors que l'ONU a récemment dénoncé un conflit désormais «ouvertement communautaire» en Syrie, M. Brahimi a estimé que «les divisions étaient au début politiques (...) mais elles prennent désormais une forme affreuse, celle des affrontements confessionnels».

«Les Syriens, les dirigeants, l'Occident et la société civile (doivent être vigilants) pour que la Syrie ne glisse pas sur cette voie très dangereuse», a-t-il ajouté.

«Je ne pense pas que vous me contredirez si je vous dis que la situation en Syrie représente un très grand danger, non seulement pour le peuple syrien et les pays voisins, mais aussi pour le monde», a-t-il poursuivi, estimant que le temps ne jouait en faveur d'aucune partie.