Pour l'ONU et Amnistie internationale, l'exécution sommaire de soldats de l'armée syrienne par des rebelles, comme celle vue sur une vidéo diffusée par des militants, ressemble fort à un «crime de guerre».

«À ce stade, (...) tout ce que l'on peut dire c'est que c'est une vidéo très choquante», a déclaré un porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Rupert Colville.

Mais «si c'est ce que cela semble être, alors ce serait un crime de guerre», a-t-il ajouté.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les soldats ont été froidement exécutés jeudi dans des attaques rebelles sur trois barrages militaires près de Saraqeb, dans le nord-ouest de la Syrie.

La vidéo diffusée par des militants montre des rebelles frappant une dizaine de soldats blessés, avant de les aligner sur le sol et de les tuer à l'arme automatique tout en les traitant de «chiens de chabbihas d'Assad», nom donné aux miliciens pro-régime.

Avant d'exécuter un prisonnier, un rebelle lui lance: «Ne sais-tu pas que nous appartenons au peuple de ce pays?» Terrorisé, le soldat répond: «Je jure au nom de Dieu que je n'ai pas tiré».

Amnistie internationale a condamné des images «choquantes d'un crime de guerre potentiel». «Au même titre que l'Observatoire dénonce les exécutions dans les prisons du régime, il refuse celles de prisonniers de guerre par les rebelles», a dénoncé, pour sa part, le directeur de l'organisation, Rami Abdel Rahmane.

Pour M. Colville, il est important que la vidéo soit authentifiée. «Nous venons juste de voir la vidéo. Il est difficile de vérifier qui est impliqué», a-t-il dit.

Il a toutefois relevé que ce ne sont malheureusement pas les premières images, depuis le début du conflit en mars 2011, d'exécutions sommaires de soldats ou de rebelles.

Cependant pour le Haut-Commissariat aux droits de l'Homme, ces images, si elles sont véridiques, constituent un crime de guerre.

«Les soldats [tués] n'étaient plus en train de combattre, et par conséquent, à ce stade, cela ressemble très vraisemblablement à un crime de guerre, un de plus», selon M. Colville.

En juillet 2012, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dans son rôle de gardien des Conventions de Genève définissant des règles de protection des personnes en cas de conflit armé, a qualifié la situation en Syrie de guerre civile, un «conflit armé non international», selon le lexique du droit des conflits.

En conséquence, les règles des Conventions de Genève peuvent être appliquées, a expliqué M. Colville. Concrètement, cela signifie que l'exécution sommaire d'un soldat, c'est-à-dire un soldat qui se fait tuer en dehors des combats sans pouvoir se défendre, est considéré comme un crime de guerre.

D'une façon générale, les organisations internationales, dont le CICR et l'ONU, s'accordent à dire qu'il ne peut y avoir d'amnistie pour les crimes de guerre.

«Les gens qui commettent ces crimes ne doivent se faire aucune illusion» quant au fait qu'ils seront jugés, «car il y a beaucoup de preuves accumulées, y compris peut-être cette vidéo» diffusée cette semaine, a déclaré M. Colville.

Un porte-parole du CICR, Alexis Heeb, interrogé par l'AFP a indiqué que son organisation ne commentait pas la vidéo. «Ceci dit, si nos équipes sur le terrain voient des abus, elles les traiteraient de façon confidentielle avec les parties», a-t-il précisé.

La commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie a, elle, rassemblé des preuves sur des crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis par les forces gouvernementales et les milices pro-régime. Elle a relevé des crimes de guerre commis par l'opposition armée, mais à une échelle beaucoup plus limitée. Deux listes confidentielles de personnes et d'unités impliquées dans des crimes ont déjà été remises par la commission, à la Haut commissaire de l'ONU pour les droits de l'Homme en vue d'éventuelles poursuites.