Face aux bombardements de l'aviation gouvernementale syrienne, des centaines de réfugiés syriens se pressent à la frontière turque, les bras chargés des quelques sacs de vêtements et cartons de nourriture qu'ils ont pu sauver.

«J'en ai assez. Personne ne devrait devoir vivre avec une peur pareille. Comment mes enfants peuvent-ils dormir si nous ne partons pas ?», se lamente Abou Alaa, un habitant de la ville d'Azaz.

Mercredi, un raid aérien sur cette ville de 70.000 habitants tenue par les rebelles a fait plusieurs dizaines de morts et de nombreux blessés, dont au moins une centaine ont été transportés dans des hôpitaux turcs. Selon une source officielle turque, une quinzaine de ces blessés ont succombé.

Une dizaine de maisons ont été détruites, selon des journalistes de l'AFP sur place.

Des familles entières font la queue au poste frontière de Kilis en Turquie. «Je n'ai rien vu de tel», s'exclame Abou Alaa, essayant de rassembler ses enfants et des membres de sa famille dans sa camionnette.

D'autres n'ont pas la chance d'avoir une voiture et ont dû parcourir à pied la quinzaine de kilomètres qui sépare Azaz de la frontière. «Cela a été un massacre, une famille entière comme la mienne a été exterminée», dit une femme qui ne veut pas donner son nom.

La Turquie est au premier rang pour dénoncer la répression exercée par le régime syrien du président Bachar al-Assad contre l'insurrection. Son territoire est utilisé comme base arrière par de nombreux groupes rebelles et plus de 60.000 Syriens sont actuellement réfugiés en Turquie.

«Assad tue les femmes et les enfants»

Azaz est elle-même située à cinquante kilomètres d'Alep, la deuxième ville de Syrie, où des rebelles retranchés résistent aux troupes gouvernementales depuis un mois.

Le bombardement visait probablement des bâtiments utilisés par l'Armée syrienne libre (ASL, composée de déserteurs et de combattants civils), selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et l'organisation Human Rights Watch (HRW), dont des enquêteurs ont pu se rendre rapidement sur place.

Mais le quartier touché «est une zone civile. Toutes ces maisons étaient remplies de femmes et d'enfants qui dormaient pendant le jeûne du ramadan», dit Abou Omar, un ingénieur 50 ans, qui a été témoin du bombardement

Pour Mohammed Nour, directeur du centre du presse à Azaz, «le centre de l'ASL n'était pas particulièrement visé, ni le lieu où les civils ont été tués. Bachar al-Assad se fiche de l'endroit où les bombes tombent et ses pilotes ne sont pas précis».

Selon HRW, qui évoque un bilan d'une quarantaine de morts, nombre des victimes sont des femmes et des enfants.

«Cette attaque horrible a tué de nombreux civils et a détruit un pâté de maisons tout entier», affirme Anna Neistat, directrice des actions d'urgence à HRW. «À nouveau, le gouvernement syrien a attaqué en ne tenant absolument pas compte des vies civiles», ajoute-t-elle.

Une commission d'enquête mandatée par l'ONU a dénoncé mercredi les crimes de guerre commis en Syrie, tant par les forces et les milices gouvernementales que l'opposition, même si à une échelle beaucoup plus limitée pour cette dernière.

Samia, recouverte de la tête aux pieds d'un voile noir, vient d'arriver à la frontière avec cinq de ses enfants.

«Mon mari et notre fils aîné sont restés derrière. L'un surveille le magasin et l'autre se bat. Mais nous avons dû partir car nous savons qu'Assad tue les femmes et les enfants», explique-t-elle.