Des opposants syriens tentent de souder leurs rangs en vue de l'après-Assad, dans un contexte de violences aggravé par le recours, selon une ONG, à la torture dans les installations carcérales du pays en proie depuis plus de 15 mois à la contestation.

Des dizaines de milliers de personnes sont détenues dans des installations carcérales où elles sont frappées, soumises à des chocs électriques et autres mauvais traitements, a indiqué mardi Human Rights Watch (HRW), qui parle d'« archipel de la torture » pour évoquer la Syrie, dont l'accès est difficile pour les journalistes en raison des restrictions imposées par le régime.

L'organisation de défense des droits de l'homme, dont le siège est à New York, a affirmé avoir eu plus de 200 entretiens avec d'ex-prisonniers ainsi que des militaires et des membres de la sécurité d'État ayant fait défection grâce auxquels elle a appris qu'il existait 27 centres de détention gérés par quatre des principales agences de renseignement syriennes connues sous le nom de « moukhabarat ».

Des prisonniers sont maintenus « dans des positions de stress douloureuses sur de longues périodes, souvent à l'aide d'équipements spécialement conçus à cet effet », indique HRW qui dénonce également « le recours à l'électricité », « les brûlures à l'acide des batteries de voitures », « les agressions et humiliations sexuelles », « l'arrachage des ongles » et « les simulacres d'exécutions »

La Haut-commissaire de l'ONU pour les droits de l'homme, Navi Pillay, a accusé pour sa part le gouvernement et l'opposition de nouvelles violations « graves » des droits de l'homme.

Le gouvernement a « bombardé de manière aveugle les zones civiles, mené des assassinats ciblés », pratiqué des actes de torture, des détentions arbitraires et des attaques contre des hôpitaux.

Mais l'opposition a assassiné des personnes soupçonnées de collaborer avec Damas, et des groupes armés ont pris au moins un établissement médical « pour des motifs militaires », a-t-elle précisé.

Au Caire, l'opposition tient mardi, à l'initiative de la Ligue arabe, sa deuxième journée de réunion en vue de resserrer ses rangs.

La réunion « est une opportunité qu'il ne faut manquer en aucun cas », a déclaré lundi le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, en appelant l'opposition à s'unir. « Le temps ne joue pas en notre faveur », a-t-il ajouté.

Mais les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL), force armée d'opposition principalement composée de soldats déserteurs, ont boycotté la rencontre qualifiée de « complot », rejetant toute négociation avec le régime, selon un communiqué signé de l'ASL et de militants « indépendants ».

« Des garanties en acier »

Pour les États-Unis, le plan international adopté cette fin de semaine à Genève sur une transition politique en Syrie offre à l'opposition des « garanties en acier » pour que le président Bachar al-Assad ne participe jamais à un futur gouvernement, une des conditions posées par l'opposition avant toute transition.

Samedi à Genève, le Groupe d'action sur la Syrie, réunissant les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (États-Unis, Chine, Russie, France et Grande-Bretagne), la Turquie et des pays représentant la Ligue arabe, a trouvé un accord sur les principes d'une transition en Syrie.

Il prévoit un gouvernement de transition qui pourra inclure des membres du gouvernement actuel et de l'opposition, et qui devra être formé sur la base d'un « consentement mutuel ».

« Il n'y a donc aucune raison pour qu'Assad, ses proches ou qui que ce soit qui ait du sang sur les mains puissent remplir ces critères », a répété Mme Nuland martelant que « cette assurance écrite (...) leur donne (aux membres de l'opposition) des garanties en acier trempé pour qu'ils puissent opposer leur veto à des gens comme Assad ».

Mais l'impasse dans le processus de transition politique pourrait conduire l'ONU à réduire, voire fermer, sa mission d'observation en Syrie, a estimé lundi l'ambassadeur français à l'ONU Gérard Araud.

Les 300 observateurs militaires non armés ont suspendu leurs patrouilles en raison des combats et le mandat de cette Mission de supervision de l'ONU (MISNUS) expire le 20 juillet.

Sur le terrain, les violences se poursuivent sans répit faisant des dizaines de morts tous les jours.

Lundi, au moins 78 personnes, dont 44 civils, ont été tuées, selon un décompte effectué par l'Observatoire syrien des droits de l'homme.

Au total, plus de 16 500 personnes ont perdu la vie dans les violences en Syrie depuis le déclenchement de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad à la mi-mars 2011, selon un dernier bilan de l'OSDH.

Alors que la tension est montée d'un cran depuis dix jours avec la Turquie, le président syrien Bachar al-Assad a exprimé des regrets que la défense de son pays ait abattu, le 22 juin, un avion de combat turc, affirmant dans un entretien avec le journal turc Cumhuriyet publié mardi que l'appareil volait dans un espace utilisé dans le passé par des avions israéliens.