L'ONU a annoncé le refus par la Syrie d'accorder des visas à trois observateurs internationaux et accusé le régime et l'opposition de violer le cessez-le-feu instauré voilà trois semaines dans le pays, où les violences ont tué 34 personnes mardi.

«Il y a eu trois refus jusqu'à présent», a annoncé à New York le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Hervé Ladsous, sans préciser la nationalité des observateurs.

Selon des diplomates, le gouvernement syrien rechigne à laisser entrer des citoyens de pays occidentaux comme les États-Unis, la France le Royaume uni ou l'Allemagne, hostiles au régime de Bachar al-Assad, où de pays arabes comme l'Arabie saoudite et le Qatar qui soutiennent l'opposition.

À Damas, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Jihad Makdessi a confirmé à l'AFP que le désaccord portait sur les nationalités, mais n'a pas voulu parler de «refus».

«Nous avons convenu avec l'équipe de l'ONU que les nationalités des observateurs devraient être approuvées par les deux parties. On ne peut pas vraiment parler de refus. Il y a bien plus de 110 nationalités qui peuvent facilement travailler en Syrie. Nous restons engagés par une approche positive à l'égard des besoins liés aux opérations de l'ONU (...)», a-t-il dit.

M. Ladsous a en outre indiqué que «les 24 observateurs» sur le terrain depuis plusieurs semaines avaient constaté que des «armes lourdes» étaient toujours présentes dans les villes, en violation du plan de l'émissaire international Kofi Annan accepté par le régime de Bachar al-Assad.

C'est en vertu de ce plan qu'une trêve a été instaurée le 12 avril, mais elle reste quotidiennement violée. Il prévoit aussi une mission de 300 observateurs mandatés par l'ONU, la libération des détenus, le droit de manifester pacifiquement et la libre circulation des médias et des humanitaires.

Les violations du cessez-le-feu constatées jusqu'à maintenant «viennent des deux camps», les forces régulières et l'opposition armée, a ajouté M. Ladsous, en refusant de dire dans quelle proportion.

Le mandat des 300 observateurs (MISNUS) qui doivent être déployés rapidement a été approuvé pour une période initiale de 90 jours par le Conseil de sécurité. «Ceci n'est pas un exercice illimité dans le temps», a souligné M. Ladsous. Les deux camps «ne doivent pas gâcher cette occasion cruciale».

La veille, le chef de l'ONU Ban Ki-moon avait appelé «toutes les parties à cesser immédiatement la violence armée sous toutes ses formes et à coopérer pleinement avec le travail de la MISNUS».

Mais sur le terrain, les violences ont continué de plus belle, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), une ONG basée en Grande-Bretagne.

Dix civils, dont neuf membres d'une même famille, ont péri dans un pilonnage de l'armée d'un village de la province d'Idleb (nord-ouest), 12 soldats ont été tués dans des combats avec des déserteurs à Deir Ezzor (est), 10 civils et deux militaires dissidents ont été abattus par l'armée à Damas, Homs et Hama (centre), a précisé l'OSDH.

Le pilonnage à Idleb est survenu au lendemain de trois attentats contre des sièges de la Sécurité dans la ville qui ont fait au moins 20 morts, en majorité des policiers, selon l'OSDH. Les médias officiels ont parlé de neuf morts en imputant les attaques à la voiture piégée à des «terroristes».

Le régime ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation populaire qui a commencé le 15 mars 2011 par des manifestations pacifiques avant de se militariser face à la répression. Il accuse des «bandes terroristes» de semer le chaos et de mener les attentats, mais l'opposition les lui impute.

Recevant lundi à Damas le chef des observateurs, le général Robert Mood, le vice-ministre des Affaires étrangères Fayçal Meqdad a réaffirmé que Damas «ferait face aux actions des bandes armées», l'appelant à «enquêter sur les violations» du plan Annan et à en référer «avec impartialité à l'ONU».

La presse officielle a accusé les observateurs d'être «incapables de prendre des mesures pour arrêter les infiltrations et les attaques terroristes».

Les observateurs déjà sur place sont répartis dans plusieurs régions -Idleb, Deraa (sud), Homs et Hama. Certains ont visité mardi la province d'Idleb, se rendant à Ariha bombardée la veille et Jisr al-Choughour, selon des militants. Leur nombre devrait passer à 100 d'ici un mois avant d'atteindre les 300.

Enfin, à Washington, le président Barack Obama a signé un décret autorisant l'application de sanctions à des groupes et individus étrangers qui essaieraient de contourner les mesures déjà en place contre la Syrie après la répression brutale de la révolte par le régime.

Depuis le début de la contestation, plus de 11 100 personnes, en majorité des civils, ont péri dans les violences, selon l'OSDH, et des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées selon des ONG. Et selon une estimation de l'ONU, plus de 65 000 Syriens ont fui leur pays.