Abdel Fattah al-Sissi, l'ex-chef de l'armée qui a destitué le président islamiste élu Mohamed Morsi, a promis lundi que l'armée ne jouerait aucun rôle au pouvoir en Égypte s'il est élu à la présidentielle fin mai.

Le maréchal à la retraite, véritable homme fort de l'Égypte depuis qu'il a annoncé l'arrestation de M. Morsi le 3 juillet, est assuré de remporter la présidentielle prévue les 26 et 27 mai, selon les experts, tant il est populaire et parce qu'un seul autre candidat ose l'affronter.

«L'armée ne jouera pas de rôle au pouvoir en Égypte», a-t-il déclaré au cours d'une interview enregistrée diffusée par deux chaînes de télévision privées, la première depuis qu'il a annoncé officiellement sa candidature il y a deux semaines.

Le gouvernement intérimaire que M. Sissi a installé dès son coup de force du 3 juillet mène, depuis, une implacable et sanglante répression contre les partisans de M. Morsi, seul chef de l'État jamais élu démocratiquement en Égypte, et contre sa confrérie islamiste des Frères musulmans, qui avait remporté toutes les élections depuis la chute de Hosni Moubarak en 2011.

«Il n'y aura rien qui ressemble aux Frères musulmans sous votre présidence ?», a demandé une journaliste. «Oui, c'est cela», a rétorqué fermement M. Sissi.

Depuis le 3 juillet, policiers et soldats ont tué plus de 1400 manifestants pro-Morsi - dont plus de 700 en une seule journée au Caire le 14 août - et emprisonné plus de 15 000 de ses partisans, selon les organisations de défense des droits de l'Homme. Des tribunaux ont condamné à mort des centaines d'entre eux après une seule journée d'audience dans des «procès de masse sans précédent dans l'Histoire récente» de l'Humanité, selon l'ONU.

Pour expliquer la destitution de M. Morsi, élu un an plus tôt, le chef de l'armée Sissi avait invoqué le 3 juillet les millions d'Égyptiens descendus dans la rue trois jours avant pour réclamer le départ de ce président accusé de mauvaise gouvernance, de vouloir accaparer tous les pouvoirs au profit des Frères musulmans et de vouloir islamiser à marche forcée une société égyptienne très libérale.

C'est pourquoi, depuis son coup de force, le maréchal Sissi jouit d'une très grande popularité à mesure que le pouvoir qu'il dirige de facto réprime les islamistes. La quasi-totalité des médias, publics comme privés, applaudissent à chaque manifestation réprimée, chaque arrestation de pro-Morsi ou chaque condamnation à mort et, chantent les louanges de Sissi qui a promis d'«éradiquer le terrorisme».

Car depuis le 3 juillet, de nombreux attentats visent les policiers et les soldats, notamment au Caire, revendiqués par des groupes jihadistes, dont certains assurent qu'ils s'inspirent d'Al-Qaïda, pour «venger» les manifestants islamistes tués ou emprisonnés. Les Frères musulmans ont dénoncé ces attaques, mais le pouvoir les en rend responsables et les a décrétés «organisation terroriste».