Les efforts diplomatiques s'intensifiaient mercredi pour sortir l'Égypte de l'impasse politique et éviter toute nouvelle violence après la menace de l'armée de disperser de force les islamistes mobilisés dans la rue un mois après la destitution du président Mohamed Morsi.

À l'intérieur comme à l'extérieur du pays, les appels se multiplient à mener une transition incluant toutes les parties, notamment les Frères musulmans dont est issu M. Morsi, destitué le 3 juillet par l'armée et détenu au secret après des manifestations massives réclamant son départ.

Au lendemain du départ de la chef de la diplomatie de l'Union européenne Catherine Ashton qui a été le premier personnage à rencontrer M. Morsi, l'envoyé spécial de l'UE au Moyen-Orient, Bernardino Leon, était attendu au Caire pour poursuivre les efforts de médiation de Mme Ashton.

Le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle devait lui aussi arriver au Caire pour réclamer jeudi un «retour rapide à la démocratie» au gouvernement intérimaire soutenu par l'armée et aux Frères musulmans qui refuse jusque-là de participer à la transition et dénonce un «coup d'État».

«Le message le plus important (de M. Westerwelle) c'est qu'il est crucial que toutes les parties s'engagent à coopérer et renoncent à la violence»,  selon son  porte-parole.

Le président américain Barack Obama va, quant à lui, dépêcher la semaine prochaine deux influents sénateurs, Lindsey Graham et John McCain, au Caire pour presser l'armée d'organiser des élections générales et d'accélérer un retour au pouvoir civil.

Au Caire, des milliers de partisans de M. Morsi, premier président démocratiquement élu d'Égypte, poursuivent leurs sit-in et ont promis de ne pas lever le camp avant le retour du chef de l'État «légitime».

La mobilisation du camp pro-Morsi a toutefois semblé marquer le pas mardi, lorsque quelques milliers de personnes seulement ont défilé dans les rues alors que les islamistes appelaient à une marche d'«un million» de personnes pour réclamer le retour de M. Morsi.

Néanmoins l'armée fait toujours peser la menace de disperser par la force les sit-in des islamistes qui occupent des places du Caire, faisant redouter de nouveaux bains de sang, notamment après la mort de 81 civils et d'un policier dans des affrontements entre islamistes et forces de l'ordre samedi dernier au Caire.

Au total, des heurts en marge de manifestations rivales pro et anti-Morsi à travers le pays et des attaques contre les forces de sécurité dans l'instable péninsule du Sinaï ont fait plus de 300 morts depuis fin juin.

Après sa rencontre avec M. Morsi, qui fut également le premier président non issu des rangs de l'armée et le premier président islamiste du pays, Mme  Ashton a plaidé mardi pour une transition «incluant toutes les forces politiques», y compris les Frères musulmans qui refuse tout dialogue avec le nouveau pouvoir, qu'elle juge illégitime.

À ses côtés, le vice-président du pouvoir intérimaire Mohamed ElBaradei, prix Nobel de la paix et ancien opposant à M. Morsi, a affirmé que  ce dernier avait «échoué» et était pour cela exclu de la transition, mais que «les Frères musulmans font toujours partie du processus politique».

Pour le ministre des Affaires étrangères Nabil Fahmy,  «les islamistes doivent prendre part à l'avenir» de l'Égypte, un avenir qui doit «englober absolument toutes les composantes de la société respectant l'État de droit et la non-violence».

Il a estimé que les Frères musulmans, interdits pendant des décennies sous l'ancien régime de Hosni Moubarak chassé du pouvoir en 2011 par une révolte populaire,  pouvaient «participer à la rédaction de la Constitution et des lois électorales», conditionnant toutefois cette participation à l'arrêt des violences.

Reflétant les craintes à l'étranger, le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel a appelé le nouvel homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, chef de l'armée et ministre de la Défense, et exhorté les militaires à la «retenue».

Enfin, la justice a prolongé de 15 jours la détention pour enquête de quatre hauts dirigeants des Frères musulmans, accusés d'«incitation au meurtre».