Un convoi d'aides humanitaires entré lundi dans la partie rebelle de la Ghouta orientale a dû abréger ses livraisons en raison de bombardements du régime sur cette enclave, dont les forces progouvernementales syriennes ont désormais repris plus du tiers.

Après plus de deux semaines de pilonnage d'une rare intensité ayant tué plus de 760 civils, le régime a reconquis 40 % de ce fief rebelle, situé aux portes de Damas et assiégé depuis 2013, d'après l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Pour la seule journée de lundi, au moins 73 civils y ont été tués par des bombardements visant plusieurs secteurs rebelles, dont Douma, selon l'OSDH.

C'est dans cette grande ville de la Ghouta orientale qu'un convoi humanitaire a pu entrer lundi, le premier à atteindre le secteur rebelle depuis le début, le 18 février, de l'offensive meurtrière des forces du régime, secondées par leur allié russe.

Le but de ces livraisons était de soulager environ 30 000 des quelque 400 000 habitants de l'enclave, qui subissent des pénuries de nourriture et de médicaments et vivent terrés dans les sous-sols.

Mais le représentant en Syrie du Haut-commissariat pour les réfugiés de l'ONU a affirmé lundi soir que le convoi avait dû se retirer après neuf heures de livraisons effectuées «en plein milieu des bombardements».

Il était composé d'une quarantaine de camions chargés d'aide médicale et de nourriture, d'après le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

Au total, l'ONU a reçu les autorisations nécessaires pour distribuer des aides pour «70 000 personnes» et un deuxième convoi est prévu jeudi.

«Pas positif», mais insuffisant

«Ce convoi est un premier pas positif», a jugé le directeur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Moyen-Orient, Robert Mardini, mais, «aussi grand soit-il, il ne sera jamais suffisant au vu des conditions désastreuses» dans l'enclave.

Dans le cadre de leur offensive au sol, les forces prorégime ont continué «d'avancer dans l'est de l'enclave», menant des combats contre Faylaq al-Rahmane et Jaich al-Islam, les deux principaux groupes rebelles dans l'enclave, a indiqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH.

Lundi soir, les forces loyalistes ont repris la ville de Mohamadiyé dans le sud de l'enclave, après avoir reconquis plusieurs villes dans l'est au cours des 72 dernières heures.

Elles contrôlent l'est et le sud-est de l'enclave et ont pris pied dans le coeur du fief rebelle, à deux kilomètres de Douma, selon l'OSDH.

Pour le directeur de l'Observatoire, la progression des forces prorégime est rapide «car les opérations se déroulent principalement dans des zones agricoles» de la Ghouta.

L'objectif de l'armée syrienne est, selon lui, de couper en deux le fief rebelle pour séparer le secteur nord, où se trouve Douma, du sud.

«Mesures réelles et concrètes»

Le président syrien Bachar al-Assad, sourd aux appels des puissances occidentales à respecter une trêve quotidienne de cinq heures mise en place par la Russie depuis une semaine, avait assuré dimanche que l'opération militaire dans la Ghouta «devait se poursuivre».

Le président français Emmanuel Macron a appelé lundi son homologue russe Vladimir Poutine à «prendre des mesures réelles et concrètes» pour que le régime syrien «accepte sans ambiguïté» une trêve dans l'enclave rebelle.

Lors d'un entretien téléphonique avec le président russe, M. Macron a aussi déploré «qu'aucune évacuation des blessés et malades n'ait été à ce stade autorisée par le régime» dans la Ghouta, selon la présidence française.

En Iran, autre grand allié du régime de Damas, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a, lui, évoqué «la capacité» de l'Iran à «intervenir de manière vigoureuse» auprès de Bachar al-Assad pour apaiser la situation.

Mais la discussion a tourné au dialogue de sourds avec le président iranien Hassan Rohani, qui a estimé qu'il n'y avait «aucun autre moyen que de renforcer le gouvernement central à Damas pour régler la crise syrienne».

Le scénario dans la Ghouta orientale n'est pas sans rappeler celui de 2016 à Alep (nord), où les rebelles avaient dû abandonner leur fief après un siège et des bombardements dévastateurs du régime et de Moscou.

Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a adopté lundi une résolution demandant l'ouverture d'une enquête sur le siège de l'enclave rebelle.

Grâce à l'appui militaire de la Russie, mais aussi de l'Iran, le régime de Bachar al-Assad a multiplié les victoires face aux rebelles et aux jihadistes, jusqu'à reprendre le contrôle de plus de la moitié du territoire syrien.

Le conflit syrien a fait plus de 340 000 morts et des millions de déplacés et réfugiés depuis 2011.