Les autorités et l'opposition syriennes se sont mutuellement accusées dimanche d'être derrière la multiplication d'attentats à la bombe à Damas et à Alep, à la veille d'élections législatives censées donner une légitimité au régime mais qualifiées de «mascarade» par la rébellion.

Les violences ont fait 11 morts dimanche, après le décès de trois personnes dans la nuit, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), alors que les autorités ont annoncé avoir achevé «les derniers préparatifs» des élections qu'elles présentent comme cruciales pour bâtir «la nouvelle Syrie».

Pour l'opposition, le régime «viole» les clauses du plan de paix de l'émissaire international Kofi Annan et est responsable des explosions meurtrières à la bombe, qui se sont multipliées ces dernières semaines.

«C'est le régime qui provoque ces explosions mystérieuses (...). Les révolutionnaires n'ont pas intérêt à ces explosions», a affirmé à l'AFP Omar Idelbi, porte-parole des Comités de coordination locaux (LCC), qui organisent la mobilisation sur le terrain, en réclamant une enquête internationale.

Mais pour les autorités, ce sont «les terroristes» liés à l'opposition qui multiplient les attaques pour créer une instabilité avant le scrutin de lundi.

Le ministère syrien de l'Intérieur a affirmé avoir pris les mesures nécessaires «pour empêcher tout dérapage de la sécurité qui influerait sur le processus électoral».

Lundi, plus de 14 millions de Syriens sont appelés aux urnes pour désigner les 250 députés de la nouvelle législature parmi 7.000 candidats, selon le ministère de l'Intérieur. Il s'agit du premier scrutin «multipartite» depuis l'abolition par référendum en février de la primauté du parti Baas.

Il se déroulera cependant dans un contexte de violences incessantes. Samedi, des attaques à la bombe avaient secoué Damas et Alep, faisant au moins cinq morts dans cette deuxième ville du pays, selon l'OSDH.

Dimanche, quatre civils et deux déserteurs ont été tués à Homs (centre), à Damas et dans la province d'Idleb (nord-ouest), où six corps ont été découverts dans un charnier. De plus, cinq soldats, dont un officier, sont morts dans des combats dans la province de Deraa (sud), a rapporté l'OSDH.

Dans la nuit de samedi à dimanche, trois personnes avaient été tuées par une explosion et des tirs dans la région de Damas, selon l'OSDH, qui a évoqué des bombardements importants dans les provinces de Homs, Idleb et Deraa.

Dans la province de Deir Ezzor (est), des soldats appuyés par des blindés ont procédé à des perquisitions et arrestations à Al-Qourié. Et de violents combats ont opposé troupes régulières et déserteurs dans la ville même de Deir Ezzor.

Les élections législatives, initialement prévues en septembre, avaient été reportées en raison du processus de réformes annoncées par le président Bachar al-Assad face à la contestation inédite à laquelle il est confronté depuis mars 2011.

Le scrutin se déroulera après plus de 13 mois de violences qui ont fait plus de 11.100 morts, en majorité des civils, selon l'OSDH et poussé à l'exil plus de 65 000 Syriens selon l'ONU, sans compter les dizaines de milliers de détenus.

«En participant à ces élections, les Syriens défient la campagne de terrorisme et d'agression menée contre la Syrie par des parties internationales et régionales qui mènent une guerre contre notre pays», a déclaré dans un communiqué le ministre de l'Information, Adnane Mahmoud.

Selon les LCC, les législatives montrent au contraire «que le régime n'est pas sérieux dans sa recherche d'une solution politique à la crise. Il continue d'avoir le même comportement qu'il y a un an, ignorant les faits imposés par la Révolution sur le terrain», a dénoncé Omar Idelbi.

D'après son organisation, 1.122 enfants ont été tués par le «régime criminel», soit une jeune victime toutes les huit heures, depuis le début de la répression.

Toutes ces violences répétées interviennent en dépit du cessez-le-feu prévu par le plan Annan depuis le 12 avril, et pour lequel des observateurs ont été déployés. Ces derniers ont visité dimanche des localités proches de Damas, et Homs.

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, ancien proche de Damas devenu très critique, a déclaré dimanche que son pays maintiendrait ses frontières ouvertes aux réfugiés syriens, qui sont pour l'instant 23.000 en Turquie.

«Dieu soit loué, une nouvelle ère va commencer en Syrie ( ...) tôt ou tard», a-t-il ajouté.

Enfin, l'Arabie saoudite, très critique du régime, a demandé à ses ressortissants d'éviter de se rendre en Syrie et à ceux qui s'y trouvaient de quitter le pays.