Le Conseil de sécurité de l'ONU a appelé Damas à cesser les hostilités avant 6h (heure locale) jeudi, les violences ayant fait encore plus de 50 morts mardi en Syrie où les forces de régime ont fait fi du plan de cessez-le-feu de l'émissaire Kofi Annan.

M. Annan, envoyé de l'ONU et de la Ligue arabe, a accusé Damas de simplement déplacer ses chars pour mener de nouvelles opérations, estimant toutefois qu'il était «trop tôt pour dire que (son) plan a échoué».

Il a déploré que Damas n'ait toujours pas donné de véritable «signal de paix» et lui a demandé de «changer fondamentalement de ligne de conduite» et de modifier de manière indiscutable son dispositif militaire, dans une lettre adressée au Conseil de sécurité de l'ONU.

M. Annan indique que les forces gouvernementales se sont retirées de certaines villes avant la date prévue du 10 avril, mais que des «opérations militaires» ont eu lieu dans d'autres agglomérations.

«Je reste convaincu que tout doit être fait pour obtenir une cessation de la violence sous toutes ses formes le 12 avril à 6h» (heure de Damas),  réaffirme-t-il.

Dans une déclaration lue par l'ambassadrice américaine à l'ONU, Susan Rice, le Conseil de sécurité a soutenu cette demande.

Arrivé en soirée en Iran, allié clé de Damas, M. Annan avait auparavant appelé toutes les parties syriennes à cesser la violence sans «condition préalable», au cours d'une visite en Turquie où il s'est rendu dans un camp de réfugiés syriens.

Damas avait accepté le plan Annan, avant d'exiger comme préalable des garanties écrites sur l'arrêt des violences commises selon lui par les rebelles, qu'il assimile à des «terroristes».

Mais l'émissaire Annan indique dans sa missive avoir été informé par le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov de ce que «le gouvernement syrien n'insiste plus pour avoir des assurances écrites» de l'opposition comme condition préalable à son retrait militaire.

Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, avait estimé que les nouvelles conditions posées par Damas étaient «inacceptables» et «irréalisables».

Sur le terrain, les rebelles, censés, selon le plan Annan, cesser également le feu d'ici jeudi matin, ont menacé le régime de nouvelles attaques s'il n'arrêtait pas ses opérations sous 48 heures.

«Pendant 48 heures, nous nous défendrons seulement. Si les bombardements ne cessent pas et que les chars ne sont pas retirés, nous passerons à l'attaque et intensifierons nos opérations militaires», a prévenu le colonel Kassem Saadeddine, porte-parole de l'Armée syrienne libre (ASL) en Syrie, joint par l'AFP.

M. Annan demande aussi à l'opposition syrienne de «respecter ses engagements», estimant les déclarations de l'opposition «encourageantes à cet égard».

Selon les opposants, un millier de personnes ont trouvé la mort en Syrie depuis le 2 avril, date à laquelle l'ONU avait annoncé l'acceptation par Damas du plan de paix en six points.

Sur place, aucun retrait des forces n'a été constaté, a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), en faisant état de 52 morts, dont 28 civils, à travers le pays.

À Moscou, Sergueï Lavrov a rapporté que Damas l'avait informé du retrait d'une partie de ses troupes de Homs (centre), où l'OSDH a pourtant recensé sept morts mardi, notamment dans des bombardements.

M. Lavrov a appelé son allié à être «plus actif» et «plus ferme» dans son application du plan Annan, lors d'une conférence de presse avec son homologue Walid Mouallem.

Il a ensuite appelé l'émissaire international pour lui demander d'intensifier la pression sur l'opposition syrienne.

Toujours à Moscou, M. Mouallem a de nouveau accusé Ankara de soutenir les rebelles, alors que la tension est brusquement montée lundi entre les deux voisins après que des tirs en provenance de Syrie ont fait des blessés en Turquie.

Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, dont le pays accueille 25 000 réfugiés syriens, a haussé le ton mardi, estimant qu'«il s'est produit une très claire violation de la frontière». «Nous prendrons évidemment les mesures nécessaires», a-t-il ajouté, sans préciser lesquelles.

«La Turquie soutient les groupes armés illégaux syriens (...) et contribue à la pénétration illégale de militants en Syrie», a rétorqué M. Mouallem, estimant que «cela contredit le plan Annan».

Les efforts diplomatiques ont «échoué» et il faut armer les rebelles, a de nouveau affirmé de son côté le sénateur américain John McCain en visite dans un camp de réfugiés syriens en Turquie.

Près de la frontière avec l'Irak, dans le nord-est de la Syrie, «les autorités ont arrêté des dizaines de soldats syriens, en majorité des Kurdes qui tentaient de rejoindre l'Irak», a annoncé l'OSDH, affirmant craindre que ces soldats ne soient «exécutés sommairement comme cela s'est déjà produit».

Selon l'OSDH, les violences ont fait plus de 10 000 morts depuis la mi-mars 2011 et plus de 100 000 personnes sont ou ont été détenues pendant cette période.