Deux attaques, attribuées par les autorités syriennes à des «terroristes», ont fait 27 morts et 140 blessés samedi à Damas, au moment où un diplomate annonçait que l'Arabie saoudite envoyait via la Jordanie du matériel militaire aux déserteurs de l'Armée syrienne libre (ASL).

Amman a toutefois «catégoriquement démenti» que des armes transitent par son territoire en direction de la Syrie, où les violences ont fait selon les militants plus de 9 000 morts en un an de révolte.

Alors que la communauté internationale a jusqu'à présent échoué dans ses efforts pour parvenir à un accord mettant fin aux violences, l'Arabie saoudite et le Qatar avaient appelé à armer les rebelles, une idée rejetée par de nombreux pays.

Un diplomate arabe a annoncé samedi à l'AFP sous le couvert de l'anonymat que «du matériel militaire saoudien» était en route pour la Jordanie afin d'«équiper l'ASL». Il n'a pas fourni de précisions sur ce matériel.

Interrogé par l'AFP à Amman, le porte-parole du gouvernement Rakan Majali a «catégoriquement démenti cette information», qualifiée de «complètement infondée».

«La Jordanie n'a ni discuté ni évoqué la question avec une quelconque partie», a-t-il insisté, sans plus de détails, ajoutant qu'une déclaration officielle serait publiée plus tard.

L'Arabie saoudite, poids lourd du monde arabe, est très critique du régime de Bachar al-Assad, annonçant mercredi la fermeture de son ambassade à Damas et le rapatriement de ses diplomates pour protester contre sa répression.

En début de matinée samedi, l'explosion de deux voitures piégées a fait 27 morts, en majorité des civils, et 140 blessés à Damas, selon la chaîne d'État, citant le ministère de l'Intérieur.

«L'Arabie saoudite nous envoie des terroristes!», ont affirmé des témoins interrogés par la télévision d'État. «Mes parents sont blessés, notre maison a été détruite. C'est ça le message des pays arabes ? (...) Montrez au monde ce qui se passe», a encore lancé un habitant.

Plusieurs analystes invités à la télévision syrienne ont accusé l'Arabie saoudite et le Qatar d'avoir une responsabilité «politique, juridique et religieuse» dans ces attentats.

Selon la chaîne, les attaques visaient deux centres de la police et des renseignements.

Sur les images de la télévision officielle, on pouvait voir un corps calciné à bord d'une voiture encore fumante, présenté comme celui d'un «terroriste». Le sol était couvert de flaques de sang et des colonnes de fumée s'élevaient d'un bâtiment, dans un chassé-croisé d'ambulances.

La chaîne a ensuite montré un immeuble détruit ainsi que plusieurs véhicules soufflés par l'explosion.

Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a condamné «avec fermeté» les deux attentats, ainsi que «tous les actes de terrorisme qui ne peuvent se justifier en aucune circonstance». L'Iran, allié de Damas, a aussi condamné ces attentats.

Depuis fin décembre, plusieurs attentats avaient déjà fait des dizaines de morts en Syrie, essentiellement à Damas et à Alep (nord), les deux plus grandes villes du pays. Autorités et militants anti-régime se sont renvoyé la responsabilité de ces attaques.

À Genève, l'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe, Kofi Annan, a estimé vendredi que les réponses syriennes à ses propositions étaient «décevantes».

«M. Annan a décidé d'envoyer une mission à Damas pour discuter des modalités d'un mécanisme d'observation et d'autres étapes pratiques pour mettre en place (...) certaines de ses propositions, incluant un arrêt immédiat de la violence et des tueries», a annoncé Ahmed Fawzi, porte-parole de M. Annan.

Ces experts partiront lundi de Genève et de New York pour rejoindre la Syrie, a-t-il précisé.

Pour la première fois, l'ONU doit participer ce week-end à une mission d'évaluation des besoins humanitaires en Syrie, dirigée par le gouvernement.

Sur le plan politique, cinq groupes ont annoncé à Istanbul la formation d'une nouvelle coalition, indépendante du Conseil national syrien (CNS), qui ambitionne de regrouper la plupart des courants de l'opposition, confirmant les difficultés des opposants à former un front uni.

Parallèlement aux attaques à Damas, deux policiers et huit civils ont péri samedi en Syrie, au lendemain de la mort de 18 personnes à travers le pays.

Dans les provinces d'Idleb (nord-ouest) et de Homs (centre), où l'armée a récemment repris deux bastions de la rébellion au prix de pilonnages dévastateurs, les militants ont affirmé qu'un «calme relatif» était revenu.

À Beyrouth, plusieurs centaines de personnes ont participé à une manifestation hostile au régime au pouvoir en Syrie, ancienne puissance de tutelle au Liban.

À Washington, plusieurs milliers de personnes ont manifesté devant les grilles de la Maison-Blanche pour demander aux États-Unis «d'arrêter le massacre en Syrie», alors que la Bulgarie a appelé ses ressortissants à quitter «immédiatement» la Syrie en raison de la détérioration de la situation.