Des milliers d'Égyptiens convergeaient vendredi vers la place Tahrir au Caire pour réclamer le départ des militaires au pouvoir depuis la chute du président Hosni Moubarak il y a bientôt un an.

Après la prière hebdomadaire de la mi-journée, des marches sont parties des différentes mosquées du Caire pour rejoindre la célèbre place, épicentre de la révolte populaire de janvier-février 2011.

«A bas le pouvoir militaire!», criaient les manifestants venus de la mosquée Istiqama à Gizeh. «La légitimité vient de la place», scandaient-ils en tapant des mains et en agitant des drapeaux.

Sur la place Tahrir, des milliers d'Égyptiens se sont réunis pour la prière parmi les tentes des centaines de personnes qui campent depuis mercredi, date anniversaire du début du soulèvement qui a mis fin à trois décennies de règne de M. Moubarak.

L'imam chargé de conduire cette prière, Cheikh Mazhar Mazhar Shahin, a affirmé que si la révolte avait conduit à des réalisations notables, le chemin vers un État démocratique était encore long.

«Le peuple est descendu (dans la rue) le 25 janvier 2011 pour réclamer la liberté, la justice, la dignité et la fin d'un régime répandant la corruption sous toutes ses formes», a-t-il rappelé à la foule.

«Il a réussi à faire tomber la tête du régime en seulement 18 jours et à mettre des symboles derrière les barreaux. Néanmoins, la révolution n'a pas atteint tous ses objectifs et c'est ce qui conduit le peuple à descendre de nouveau dans la rue pour ce premier anniversaire», a-t-il ajouté.

M. Moubarak, en détention dans un hôpital militaire, est actuellement jugé pour la mort de manifestants durant la révolte, qui a fait officiellement près de 850 morts. Ses deux fils Alaa et Gamal ainsi que plusieurs de ses ministres sont aussi en prison, accusés de corruption.

La journée de vendredi a été placée sous le slogan «de la fierté et de la dignité» par les dizaines de groupes pro-démocratie à l'initiative de la mobilisation. Des manifestations doivent également avoir lieu dans d'autres villes du pays, en particulier à Alexandrie (nord) et à Suez (nord-est).

Les Frères musulmans, grands vainqueurs des récentes élections législatives, occupaient une partie de la place Tahrir, où l'ambiance était plutôt à la fête.

Plus loin, les slogans étaient résolument contre le pouvoir militaire, et nettement moins euphoriques. «Aucun des objectifs de la révolution n'a été réalisé. Qu'est-ce qu'ils fêtent?», s'interrogeait Fahd Ibrahim, un manifestant.

«Nous voulons aussi faire avancer les objectifs de la révolution. Nous voulons la même chose, mais chacun prend une route différente», insistait Essam Elsawy, un membre de la confrérie.

Les manifestants réclament tous la fin du recours à des tribunaux militaires pour juger des civils, une restructuration du ministère de l'Intérieur, et le respect des libertés et de la justice sociale. Mais les islamistes insistaient moins sur le départ des militaires du pouvoir.

L'armée a promis de rendre le pouvoir aux civils à l'issue d'une élection présidentielle prévue avant juillet, mais nombre d'Égyptiens l'accusent de vouloir préserver ses privilèges et continuer à influencer la vie politique.

L'opposant Mohammed ElBaradei a proposé vendredi une nouvelle feuille de route pour le pays, appelant «le Parlement à élire immédiatement un président par intérim», puis à former une commission pour rédiger une nouvelle Constitution.

Un président, dont «les pouvoirs seraient définis par la nouvelle Constitution», serait ensuite élu, et un nouveau scrutin législatif suivrait.

«Après un an de tâtonnement, il est temps de se mettre d'accord pour corriger le tir», a insisté M. ElBaradei.