Le chef de la Ligue arabe a affirmé samedi être parvenu à un accord sur les réformes avec le président Bachar al-Assad lors d'une brève visite en Syrie, tout en soulignant son refus de toute ingérence étrangère, malgré la répression meurtrière qu'il dénonce.

Cette visite, au cours de laquelle Nabil al-Arabi devait proposer à M. Assad un plan en 13 points, était la première initiative concrète de la Ligue arabe depuis le début de la contestation contre le régime syrien, le 15 mars.

«Nous sommes parvenus à un accord sur des mesures pour mener les réformes, dont les éléments seront soumis au Conseil de la Ligue arabe» qui se réunit lundi au Caire, a annoncé à la presse M. Arabi à son retour de Damas, sans plus de précisions.

M. Arabi, à la tête de la Ligue depuis le 3 juillet, devait proposer au président syrien un plan de sortie de crise appelant à l'«arrêt immédiat» de la répression et à la tenue d'une élection présidentielle pluraliste ouverte à tous les candidats éligibles en 2014.

La proposition, élaborée par les ministres des Affaires étrangères de la Ligue, enjoint également à M. Assad d'«entamer des contacts sérieux avec les représentants de l'opposition syrienne», de libérer les prisonniers politiques et d'indemniser ceux qui ont été lésés par la répression du mouvement de contestation qui dure depuis près de six mois.

M. Arabi a déclaré avoir insisté auprès de M. Assad pour qu'il y ait «un dialogue ouvert entre toutes les catégories du peuple syrien pour parvenir à la réconciliation nationale» en Syrie, où le mouvement de contestation, qui réclamait initialement des réformes démocratiques, exige désormais le départ du président Assad.

Le secrétaire général de la Ligue arabe a expliqué avoir «souligné la nécessité de trouver une issue à la crise actuelle et de prendre des mesures immédiates pour mettre fin à la violence et l'effusion de sang».

Plus «de 3000 personnes ont été tuées» depuis le début de la contestation en Syrie, a affirmé à Tunis Radwan Ziadh, dirigeant du Centre syrien des études politiques et stratégiques, basé Washington. Selon l'ONU, les violences ont fait au moins 2200 morts.

M. Arabi a exprimé le «souhait d'aider la Syrie à surmonter cette phase» difficile, selon l'agence officielle syrienne Sana, qui a précisé que les deux parties se «sont mises d'accord sur un certain nombre de mesures concrètes à entreprendre pour accélérer les réformes en Syrie».

Mais le président de la Ligue arabe a parallèlement réaffirmé «le refus de la Ligue de toute forme d'ingérence étrangère dans les affaires intérieures syriennes».

De son côté, le président Assad a dénoncé une campagne de «falsification des faits» visant selon lui à «porter atteinte à l'image de la Syrie et à déstabiliser» le pays, a indiqué Sana.

La visite de M. Arabi était initialement prévue mercredi, mais la Syrie avait demandé au secrétaire général de la Ligue de reporter sa visite, «en raison de circonstances indépendantes de (sa) volonté».

Le plan de règlement de la Ligue arabe avait au départ provoqué la colère de Damas, selon qui elle contenait «un langage inacceptable et biaisé».

La visite de M. Arabi est intervenue alors que ni les manifestants pour la démocratie ni les autorités de Damas, qui affirment se battre contre des «bandes terroristes armées», ne lâchent prise.

Au moins 12 personnes ont encore été tuées samedi dans des opérations des forces de l'ordre à travers le pays, dont huit à Homs (centre), d'après l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et des militants.

Dans le Nord-Ouest, un jeune homme est mort à Khan Sobol, dans les environs de la ville d'Idleb, tué par des tirs à un point de contrôle de la Sécurité, d'après l'OSDH.

Et dans le Sud, trois civils ont été tués et 12 personnes blessées par des tirs des forces de sécurité sur des manifestants samedi soir devant la mairie de Nimr, dans la province de Deraa.

D'autre part, selon l'OSDH, les corps de deux frères, dont un officier ayant fait défection, ont été remis à leur famille dans le village de Rami (nord-ouest). Ils avaient été arrêtés jeudi.

Le corps d'un militant, Ghiyath Matar, qui a joué un rôle clé dans l'organisation de manifestations anti-régime, a également été remis à sa famille samedi, selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch qui cite des militants. Arrêté le 6 septembre, Ghiyath Matar, est décédé à la suite de tortures, il présentait des ecchymoses à la poitrine et des traces de blessures sur le visage, selon des militants.

Vendredi, des dizaines de milliers de manifestants avaient pour la première fois réclamé une protection internationale face à la répression, demandant l'envoi d'«une mission d'observateurs permanents en Syrie».

Les États-Unis ont indiqué vendredi qu'ils voulaient «accélérer le travail la semaine prochaine» à l'ONU, où les Occidentaux tentent sans succès d'obtenir une condamnation plus ferme du régime syrien.

Les États-Unis et plusieurs de leurs alliés européens, en particulier la France et l'Allemagne, ont pris des sanctions contre le régime de M. Assad, et souhaitent le faire condamner par une résolution de l'ONU. Mais la Russie, un membre permanent du Conseil de sécurité, s'oppose depuis des mois à une telle initiative, en invoquant le principe de non-ingérence.