Plus de 300 opposants syriens se sont réunis samedi à Istanbul avec l'ambition de rassembler l'opposition, cependant le chef de la diplomatie américaine Hillary Clinton, également en Turquie, s'est montrée nettement en retrait dans sa condamnation du régime de Bachar al-Assad.

Les opposants syriens, réunis dans une salle de conférence de la banlieue d'Istanbul pour une «Conférence de Salut national», ont commencé leurs travaux par l'hymne national syrien et une minute de prière à la mémoire des victimes de la répression.

Plus d'un million de personnes ont manifesté vendredi contre le régime en Syrie, provoquant une répression qui a coûté la vie à 28 manifestants, selon des militants.

«Le régime a perdu sa legitimité. Il ne peut pas rester au pouvoir après le sang versé, il doit répondre aux revendications des opposants et quitter le pouvoir d'une manière pacifique», a déclaré Mechaal al-Tamo, un militant kurde intervenant par téléphone depuis Damas.

Les opposants ont aussi déploré l'attaque vendredi soir des locaux d'une réunion jumelle, qui devait avoir lieu simultanément à Damas et a été annulée.

«Hier soir le lieu de la conférence a été attaqué, il y a eu neuf martyrs et cent blessés à Damas, donc la conférence n'a pas eu lieu. Les victimes étaient autour du lieu de la conférence pour la protéger quand les policiers en civil ont attaqué», a affirmé à l'AFP Wael el-Hafez, chef du bureau politique du Mouvement populaire pour le changement en Syrie.

Après des discussions parfois houleuses, marquées par des objections virulentes de représentants kurdes réclamant une prise en compte de leur identité ethnique, les participants à la conférence se sont mis d'accord sur une déclaration finale, qu'ils devaient encore entériner par un vote.

Ce texte comprend «des appels généraux à l'unité nationale, à l'unité des opposants», selon M. Hafez, médecin installé à Paris. Une première mouture du texte insistait sur la nécessité d'un «gouvernement démocratique et pluraliste où tous les Syriens peuvent participer comme des citoyens égaux».

Les participants devaient aussi élire 25 représentants permanents, dont la définition du rôle a donné lieu à des controverses, certains opposants estimant que la conférence, dominée par des courants islamistes, n'était pas assez représentative pour parler au nom de l'ensemble de la révolution syrienne.

«Nous allons élire une liste de 25 personnes qui représenteront cette conférence d'Istanbul, auxquelles s'ajouteront 50 autres représentants pour l'intérieur, pour la Syrie, soit au total 75 personnes qui normalement nommeront un bureau exécutif qui va représenter la révolution syrienne», a indiqué M. Hafez.

Une réunion sans précédent d'opposants s'était déroulée le 27 juin à Damas, et deux réunions de l'opposition syrienne ont déjà eu lieu en Turquie, en avril et en juin.

«Les efforts de l'opposition pour se regrouper, pour s'organiser et définir un programme constituent une part importante de la réforme politique», a pour sa part déclaré Hillary Clinton, en visite à Istanbul.

Mais ses propos se sont situés en net retrait par rapport à ses déclarations du début de la semaine.

La tentative des Syriens de constituer une opposition est «encourageante», a-t-elle dit, évoquant son espoir d'une «coopération pacifique avec le gouvernement en vue d'un avenir meilleur».

Elle a jugé, de manière plus générale, que la situation syrienne ne pouvait pas être influencée de l'extérieur.

«Aucun d'entre nous n'a vraiment d'influence, en dehors du fait de dire ce que nous croyons, et d'encourager les changements que nous espérons», a-t-elle déclaré à la chaîne de télévision CNN-Türk.

«Ce qui se passe en Syrie est très incertain et troublant, parce que nombre d'entre nous avaient espéré que le président Assad ferait les réformes nécessaires», a-t-elle ajouté.

Or, Mme Clinton avait franchi un pas lundi en estimant, pour la première fois, que M. Assad avait «perdu sa légitimité».

«Le président Assad n'est pas indispensable et nous n'avons absolument pas intérêt à ce qu'il reste au pouvoir», avait-elle lancé, avertissant le dirigeant syrien qu'il ferait «une erreur» en pensant que Washington redoute sa chute.