Le pouvoir égyptien a cherché mercredi à apaiser la contestation en annonçant un report d'un à deux mois des législatives de septembre et le renvoi de centaines de hauts gradés de la police.

Ces annonces surviennent après des semaines de critiques dans les milieux politiques contre la date des législatives, jugée trop proche pour permettre une préparation convenable.

La demande de sanctions contre les policiers jugés responsables de la mort de manifestants durant le soulèvement populaire de janvier-février est quant à elle au coeur des manifestations qui se déroulent depuis plusieurs jours place Tahrir au Caire et dans d'autres villes du pays.

Le report des premières législatives depuis la chute du régime du président Hosni Moubarak en février a été annoncé par un responsable de l'armée, qui dirige désormais le pays, cité par l'agence officielle Mena.

«Il a été décidé de tenir les élections pour l'Assemblée du peuple (Chambre basse) et la Choura (Chambre haute) en octobre ou novembre prochains», a-t-il dit.

L'échéance de septembre était fortement critiquée par des formations politiques et des mouvements issus de la révolte contre le régime, qui ont fait valoir ne pas avoir assez de temps pour se préparer.

Des voix se sont également élevées pour redouter que la confrérie islamiste des Frères musulmans, qui apparaît comme le mouvement le mieux organisé du pays, ne rafle la mise si le scrutin était maintenu à une date trop rapprochée.

Les Frères musulmans sont opposés à un report, mais ont assuré que s'il y avait un délai supplémentaire, ils en profiteraient eux aussi.

Mais ce report pourrait aussi avoir une raison pratique: l'impréparation actuelle de l'Égypte pour organiser matériellement un scrutin dans des conditions de régularité inconnues sous l'ancien régime.

Le ministre adjoint de l'Intérieur responsable des élections, Mohamed Refaat Komsan, en déplacement à Bucarest, a promis des élections «propres, sans discrimination et transparentes».

De nombreuses personnalités et mouvements réclament toutefois la rédaction d'une nouvelle Constitution en préalable aux législatives, afin de garantir un ancrage démocratique à l'Égypte quel que soit le résultat du vote.

Le report des législatives pourrait aussi se traduire par un délai supplémentaire pour la présidentielle qui doit se tenir après. L'armée avait initialement évoqué la possibilité qu'elle ait lieu avant la fin de l'année, mais sans donner de date précise.

Le ministre de l'Intérieur Mansour Issaoui a quant à lui annoncé le renvoi de plus de 650 hauts gradés de la police, dont de nombreux généraux, parlant du «plus grand remaniement de l'histoire des forces de police» en Égypte.

La purge de la police est réclamée à cor et à cri par les manifestants qui accusent le pouvoir d'assurer une impunité de fait aux responsables de la répression des manifestations anti-Moubarak du début de l'année.

Les premières réactions place Tahrir étaient à la déception, certains parlant toutefois d'un pas dans la bonne direction.

«C'est juste du théâtre. Le plus important n'est pas de reporter les élections, mais d'avoir une nouvelle Constitution d'abord», affirmait Hussein Abdel Aziz, 38 ans.

Pour Naguib Saïd, 31 ans, «les renvois de la police ne sont pas suffisants. La priorité doit aller à la tenue de véritables procès pour les policiers meurtriers».

Mais pour Mai Khaled, 31 ans, «si les renvois de policiers ont vraiment lieu, c'est une bonne nouvelle». Quant aux législatives, «leur report va donner plus de temps aux partis pour se préparer».