L'armée appuyée par des chars a étendu samedi ses opérations dans le nord-ouest syrien, proche de la Turquie, avec l'objectif d'étouffer toute contestation du régime, la Grande-Bretagne appelant ses ressortissants à quitter immédiatement la Syrie de crainte d'une escalade.

Pendant ce temps, des dizaines de milliers de Syriens enterraient leurs morts au lendemain de la répression d'imposantes manifestations à travers le pays durant lesquelles 19 civils ont péri, selon les Comités locaux de Coordination, une ONG syrienne qui chapeaute les militants organisant les manifestations.

L'ONG a fourni une liste nominative de 12 et dit s'enquérir des noms des autres victimes.

Quelque 70 000 personnes en colère ont participé samedi à Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, aux funérailles de deux manifestants tués la veille, a déclaré à l'AFP le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, Rami Abdel Rahmane.

«L'ambiance était à la colère et les gens scandaient des slogans contre le régime», a-t-il expliqué.

M. Abdel Rahmane a également indiqué que des milliers de personnes avaient participé à des obsèques à Homs (centre) où cinq personnes ont été tuées vendredi lorsque les forces de sécurité ont ouvert le feu sur les manifestants.

Des funérailles d'une autre victime ont également eu lieu à Douma, à 15 km au nord de Damas. Les personnes qui y assistaient ont observé un sit-in devant la mosquée principale de la ville, selon lui.

Selon l'Observatoire, 1309 civils et 341 membres des forces de sécurité ont été tués dans des violences depuis le début du mouvement de contestation le 15 mars.

Cherchant à étendre leur contrôle sur la région nord-ouest, les soldats syriens appuyés par des chars ont par ailleurs pénétré samedi matin dans le village de Bdama, dans le gouvernorat d'Idleb, tout près de la frontière turque.

Au moins six chars et 15 transports de troupes ont pénétré dans le village, a indiqué M. Abdel Rahmane.

Des jeeps militaires, qui selon lui transportent généralement des officiers, faisaient également partie du convoi. Des «tirs nourris ont été entendus dans le village», a-t-il dit.

Selon M. Abdel Rahmane, Bdama assure l'approvisionnement en produits de première nécessité, notamment la nourriture, des déplacés syriens ayant fui leurs villages et installés provisoirement du côté syrien de la frontière.

Le village est situé à quelques kilomètres au nord de la ville de Jisr al-Choughour meurtrie par la répression et désertée par ses habitants qui ont pris la fuite en Turquie après l'intervention de l'armée la semaine dernière dans leur localité qui fut le théâtre de manifestations anti-régime.

Dans le même gouvernorat, sept véhicules militaires ont pénétré dans la ville de Khan Cheikhoune, assiégée depuis plusieurs jours par l'armée, selon M. Abdel Rahmane.

Face à la persistance du régime à ignorer les appels internationaux à cesser la répression, Londres a appelé ses ressortissants à quitter la Syrie avertissant que son ambassade à Damas pourrait ne pas être en mesure d'organiser leur évacuation si la situation se dégradait.

«Les ressortissants britanniques devraient partir immédiatement par des vols commerciaux tant qu'ils fonctionnent encore normalement», a affirmé le ministère britannique des Affaires étrangères.

Les États-Unis et l'Union européenne poursuivent de leur côté leurs efforts pour tenter d'accroître la pression sur le président syrien, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton jugeant inéluctable le changement en Syrie.

La «brutalité» du régime pourrait permettre à M. Assad «de repousser le changement en cours en Syrie, mais pas de l'inverser», écrit Mme Clinton dans une tribune publiée par le quotidien arabe Asharq Al Awsat. «Il n'y a pas de marche arrière possible», a-t-elle dit.

Mme Clinton s'est entretenue par téléphone avec son homologue russe Sergueï Lavrov, au sujet de sanctions contre le régime, la Russie, comme la Chine, rejetant pour le moment toute ingérence internationale en Syrie.

Pour leur part, deux hauts responsables américains ont annoncé sous couvert de l'anonymat que les États-Unis cherchaient à faire poursuivre les responsables syriens pour «crimes de guerre».

Au Caire, le secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa a fait part de «l'inquiétude du monde arabe» face à la crise en Syrie. Cette question fait l'objet de «beaucoup de contacts» entre les dirigeants de la région, a-t-il ajouté.