Le départ du président yéménite Ali Abdallah Saleh, opéré avec succès dimanche en Arabie saoudite après avoir été blessé dans un attentat, a été célébré par des dizaines de milliers de personnes, l'opposition se déclarant déterminée à empêcher son retour.

Accusé par le gouvernement d'être à l'origine du bombardement qui a blessé vendredi M. Saleh, le puissant chef tribal des Hached, Sadek al-Ahmar, a accepté dimanche soir sous conditions un cessez-le-feu ainsi que l'évacuation des bâtiments publics qu'occupent ses partisans à Sanaa.

Toute la journée, les «jeunes de la révolution» avaient célébré dans la capitale et à Taëz ce qu'ils considèrent comme «la chute du régime».

«Aujourd'hui, un nouveau Yémen est né», scandaient des dizaines de milliers de jeunes enthousiastes sur le lieu du sit-in permanent près de l'Université de Sanaa, selon un correspondant de l'AFP.

«C'est fini, le régime est tombé», répondaient d'autres. Ceux qui arrivaient sur la place, où avaient été organisés des festins, se félicitaient de ce qu'ils considèrent comme «la fuite de M. Saleh», dont ils réclamaient la démission depuis janvier.

Mais le président contesté, au pouvoir depuis 33 ans, a bien l'intention de regagner la capitale yéménite. Il le fera dans deux semaines, après sa période de convalescence, a indiqué à l'AFP un responsable saoudien.

Evacué samedi à Ryad pour être traité, il «a subi deux opérations qui ont réussi: la première a consisté à extraire un éclat (d'obus) de la poitrine, alors que la deuxième est une opération de neurochirurgie au cou», a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat.

«La prochaine opération sera une opération de chirurgie esthétique», a-t-il ajouté.

Le président avait été blessé, comme plusieurs autres hauts dirigeants, dans un bombardement vendredi de la mosquée de son palais présidentiel.

Son hospitalisation à Ryad laisse planer le doute sur le détenteur du pouvoir à Sanaa où le vice-président Abed Rabbo Mansour Hadi n'a pas été officiellement chargé de l'intérim, comme le prévoit la Constitution, alors qu'une lutte au pouvoir est ouverte dans le pays.

Pour le porte-parole de l'opposition parlementaire, Mohamed Qahtan, son départ «marque, pour nous, le début de la fin de ce régime tyrannique et corrompu. Nous oeuvrerons de toutes nos forces pour empêcher son retour».

M. Mansour Hadi s'est entretenu dimanche avec l'ambassadeur des États-Unis à Sanaa, Gerald Feierstein, de la situation dans le pays, a rapporté l'agence officielle Saba sans pour autant indiquer qu'il assumait la charge de président par intérim.

«Nous sommes totalement disposés à coopérer avec Abed Rabbo, mais la difficulté réside dans le fait de savoir si les fils (et les neveux de Saleh) sont disposés à remettre le pouvoir à Mansour Hadi», a répondu M. Qahtan en réponse à une question.

Le fils aîné du président, Ahmed, et ses neveux contrôlent les principaux organes de sécurité, notamment la Garde républicaine.

L'absence de M. Saleh n'a toutefois pas marqué la fin des violences.

A Taëz, grande ville du sud-ouest et l'un des foyers de la contestation, les réjouissances de centaines de manifestants ont été de courte durée.

De nouveaux affrontements armés ont fait quatre morts parmi les Gardes républicains, corps d'élite fidèle au régime, et trois hommes armés parmi des miliciens se proposant de protéger les manifestants.

La situation était relativement calme dans la capitale dimanche, après des tirs intermittents durant la nuit. Mais trois soldats dissidents sont morts dans une explosion accidentelle, selon une source militaire.

Par ailleurs, le comité d'organisation de la contestation a appelé à la constitution de comités de vigiles pour protéger les biens publics contre les destructions et les pillages.

Cet appel a été lancé à la suite de pillages qui ont eu lieu samedi à Taëz après le retrait du centre de cette ville des forces de sécurité. Ces dernières ont réprimé durement ces derniers jours plusieurs manifestations hostiles au régime