Un chef tribal yéménite affirme que des combats récents entre ses hommes et ceux du président Ali Abdullah Saleh ont fait au moins 18 morts dans les rangs tribaux.

Depuis le début de la semaine, les combats de rue à Sanaa ont fait au moins 127 morts. Ils opposent les forces gouvernementales à celles de la confédération tribale des Hashid, la plus importante du pays, qui ont pris les armes après avoir rejoint le camp de l'opposition au président Saleh.

Ce nouveau chapitre dans la crise laisse craindre que le pays ne s'enfonce dans une véritable guerre civile, en raison de l'importance du facteur tribal au Yémen. Les tribus de la confédération des Hashid, basées dans le nord, comptent des centaines de milliers de membres et leurs chefs sont puissants.

La propre tribu à laquelle appartient le président Saleh, celle des Sanhan, fait partie de la confédération, et la force des fidélités tribales est telle que près de la moitié des Sanhan ont abandonné la cause de Saleh depuis que les chefs hashid ont annoncé, il y a déjà plusieurs semaines, qu'ils choisissaient le camp de l'opposition.

Selon le cheikh Ali Saïf, un des dirigeants des Hashid, les combattants tribaux ont pris le contrôle de deux camps militaires à 80 kilomètres au nord-est de la capitale. Dix-huit hommes auraient perdu la vie lors du premier assaut, mais aucun lors du second. On ne dispose d'aucun bilan du côté des forces gouvernementales.

Après la capture du camp de la Garde républicaine dans la région d'el-Fardha Nehem, l'aviation gouvernementale l'a bombardé et de nouveaux affrontements ont eu lieu, a-t-il ajouté.

Toujours selon Ali Saïf, ses combattants se sont également emparés de deux hélicoptères gouvernementaux, en ont abattu un troisième, et ont fait de nombreux prisonniers.

Cette base a été attaquée pour éviter qu'elle n'envoie des renforts à Sanaa, a-t-il expliqué. La Garde républicaine - l'un des corps les mieux entraînés et équipés des forces yéménites, commandé par l'un des fils de Saleh - reste loyale au président, alors même que d'autres unités de l'armée ont rejoint les rangs de la contestation.

De leur côté, les responsables yéménites affirment que quelques centaines de militants islamistes ont pris le contrôle de la ville de Zinjibar, dans le sud du pays. Les assaillants auraient notamment investi deux banques, deux bureaux des forces de l'ordre et un local utilisé par les autorités fiscales municipales. Plusieurs craignent de voir les militants profiter de l'instabilité du pays pour faire des gains.

Alors que les combats s'étaient étendus jeudi à de nouveaux quartiers de Sanaa, vendredi, la télévision publique appelait les habitants d'autres quartiers à évacuer, en prévision de nouveaux affrontements.

Si jusqu'à présent les unités militaires d'élite, commandées par des proches parents de Saleh, lui sont restées fidèles, l'escalade avec les tribus pourrait potentiellement menacer cet état de fait: en vertu des codes d'honneur traditionnels, les chefs de tribu peuvent en effet déclarer leurs ordres supérieurs à tout autre, contraignant potentiellement les soldats de ces unités d'élite à choisir entre la fidélité à leur clan et la fidélité à leur chef militaire, ce qui pourrait susciter des défections.

Les tribus de la confédération des Hashid tiennent les leviers de l'économie et du gouvernement. L'autre grande confédération du Yémen, celle des Bakil, basée dans le sud, compte un bien plus grand nombre de tribus, mais a moins de pouvoir politique et économique et beaucoup moins de cohésion. La plupart des tribus se sont déjà retournées contre Saleh.