Les militants anti-régime ont appelé à des sit-in permanents à partir de mardi soir dans les villes de Syrie alors que plus de mille personnes ont été arrêtées ces deux derniers jours pour tenter d'enrayer le mouvement de contestation sans précédent contre le régime du président Assad.

«Il y a eu une intensification insensée des arrestations. Les autorités arrêtent tous ceux qui veulent manifester», a indiqué l'Organisation nationale des droits de l'Homme (ONDH) selon laquelle le nombre de personnes arrêtées ces deux derniers jours dépasse les 1 000.

Entretemps la pression internationale s'accentuait sur Damas, le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé affirmant mardi qu'«un gouvernement qui tue ses citoyens» qui manifestent «perd sa légitimité».

Il a indiqué que la France souhaitait que le président Bachar al-Assad fasse partie des personnes visées par les sanctions européennes en préparation contre le régime de Damas.

M. Juppé avait estimé lundi que le régime syrien allait tomber s'il persévère dans sa répression violente de manifestations. «Si le régime syrien persévère dans cette voie (de la répression), il tombera un jour ou l'autre, mais il tombera».

Selon l'organisation des droits de l'Homme «Insan», 607 personnes ont été tuées depuis le début de la révolte en Syrie, il y a un mois et demi.

«Nous appelons les Syriens de toutes les régions à se rendre à partir de mardi soir sur toutes les places publiques pour organiser des sit-in qui se poursuivront jour et nuit», affirme une page de «Syrian révolution 2011» sur Facebook.

Bravant la répression, des militants ont diffusé sur YouTube des images de petites manifestations lundi soir dans les villes de Homs et Damas, où des manifestants ont défilé dans le quartier de Midane.

«Non à la violence, non au sabotage, non au chômage», pouvait-on lire sur une banderole brandie par les manifestants dans le quartier de Bab Sbaa à Homs alors que d'autres scandaient «par notre âme, par notre sang, nous nous sacrifierons pour nos martyrs» dans le quartier de Bab Drib.

Des rassemblements ont également eu lieu dans la ville de Hama ainsi qu'à Jassem, une localité proche de la ville de Deraa (sud), épicentre de la contestation.

À Banias, à 280 km de la capitale, les protestataires s'attendaient mardi à un assaut des services de sécurité sur leur ville assiégée, a affirmé un militant des droits de l'Homme.

«Les arrestations de militants soupçonnés d'organiser les manifestations se poursuivent sans interruption dans tout le pays sur la base de listes», a déclaré à l'AFP Rami Abdel Rahman, président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, basé à Londres.

Pour sa part, Ammar Qorabi, président de l'Organisation nationale des droits de l'Homme, a affirmé qu'en «l'espace de trois jours plus de mille personnes ont été arrêtées en Syrie, dont la moitié à Deraa et sa province».

Un porte-parole militaire avait fait état la veille de l'arrestation de «499 membres de groupes terroristes à Deraa», de la mort de «deux militaires et membres des forces de sécurité ainsi que de dix terroristes» et de l'arrestation de cinq tireurs embusqués.

Le régime accuse des «gangs criminels armés» ou des «groupes terroristes» d'être à l'origine des violences depuis le début de la contestation.

Selon un militant des droits de l'Homme à Damas, «les jeunes de Deraa âgés de 18 à 40 ans qui figurent sur des listes pour avoir participé à des manifestations, sont conduits pour interrogatoire au stade de cette ville» (100 km au sud de Damas).

Il a précisé qu'il y avait de l'eau et de l'electricité à Deraa à l'exception du quartier de la mosquée Omari, principal théâtre d'affrontements. La veille un militant avait jugé «la situation critique, mais ce n'est pas la famine».

Le président Assad a affirmé que des «voitures gouvernementales distribuent du pain, de la farine, des conserves et d'autres produits alimentaires, aux habitants de Deraa, a rapporté mardi le quotidien privé Al-Watan, proche du pouvoir.

M. Assad a évoqué lundi «l'accroissement des réformes en cours en Syrie», en recevant le ministre émirati des Affaires étrangères.

Le Comité international de la Croix-Rouge a demandé mardi un accès «immédiat» aux blessés à Deraa, assiégée depuis plus d'une semaine. «Jusqu'à présent, nous avons eu un accès restreint à certaines zones, mais aujourd'hui nous avons besoin d'un accès plus large, spécialement dans le sud», particulièrement à Deraa, a affirmé à Genève Hisham Hassan, porte-parole du CICR.

Par ailleurs, le journaliste algérien Khaled Sid Mohand, arrêté le 9 avril à Damas, a été libéré mardi.

Le ministre israélien de la Défense Ehud Barak a estimé mardi que le régime du président Assad était voué à disparaître, affirmant par ailleurs qu'«Israël n'a pas à s'effrayer du fait qu'Assad puisse être remplacé (...) Le processus engagé dans l'ensemble du Moyen-Orient est très prometteur et suscite des espoirs à long terme».