Des milliers de manifestants ont exigé dimanche à Manama la démission du premier ministre bahreïni, en poste depuis 1971, en se massant pour la première fois devant le palais où le cabinet tenait sa réunion hebdomadaire.

La foule agitait des drapeaux bahreïnis et scandait des slogans hostiles à la dynastie des Al-Khalifa, une lignée sunnite qui règne depuis 200 ans sur ce royaume dont la population autochtone est en majorité chiite.

«Le peuple veut la chute du régime!», scandaient les manifestants en levant le poing en direction du palais. «Khalifa, pars», répétaient-ils à l'adresse du Premier ministre Khalifa ben Salman Al Khalifa.

Des forces de police, équipées de casques et de boucliers, ont pris position devant le palais al-Qudaibiya, mais aucun incident n'a été signalé.

«Nous voulons le départ du Premier ministre», oncle du roi Hamad ben Issa Al-Khalifa, a expliqué Alaa al-Nasr, un manifestant de 24 ans.

«Nous sommes ici parce que nous ne voulons pas de ce gouvernement», a affirmé Nawal Hassan, 29 ans, drapée dans son abaya noire, un drapeau bahreïni noué autour du cou.

Dans un communiqué publié à l'issue de la réunion, le conseil des ministres a affirmé «respecter la liberté d'opinion» mais demandé aux manifestants «de ne pas porter atteinte aux intérêts publics».

Le gouvernement a également «mis en garde contre les actes pouvant provoquer des tensions confessionnelles» dans le pays.

Haranguant les manifestants, le chef du Wefaq, principal mouvement de l'opposition chiite, cheikh Ali Salmane, a réclamé une «réforme politique» qui permettrait «au peuple de choisir son gouvernement».

«Nous voulons un pays où les sunnites et les chiites puissent vivre en sécurité et en toute dignité», a ajouté le chef chiite, exhortant les manifestants à «préserver le caractère pacifique de leur mouvement».

Depuis trois semaines, des manifestations dans le centre de Manama exigent une plus grande participation populaire dans la gestion de ce royaume, qui occupe une position stratégique dans le Golfe.

Les plus radicaux des manifestants demandent la fin de la dynastie des Al-Khalifa et le départ du roi, en dépit de récentes concessions, dont un remaniement ministériel le 26 février.

Les protestataires campent depuis le 19 février sur la place de la Perle dans le centre de Manama, où ils ont érigé des dizaines de tentes, mais c'est la première fois que les manifestants se regroupent devant le siège du gouvernement.

Vendredi, des milliers de manifestants avaient formé une chaîne humaine sur six kilomètres à Manama, entre la place de la Perle et la mosquée sunnite d'al-Fateh, pour réclamer la démission du gouvernement et appeler à l'unité entre sunnites et chiites.

Bahreïn est secoué depuis le 14 février par un mouvement de contestation, au début duquel sept personnes ont été tuées par des tirs des forces de l'ordre.

L'opposition réclame pour entamer un dialogue proposé par le prince héritier Salman ben Hamad Al-Khalifa la démission du gouvernement actuel.

Dimanche, le chef du Wefaq, Cheikh Salmane a également appelé les chiites à demeurer «en harmonie avec les sunnites», ajoutant: «nous ne tentons pas de nous débarrasser de la dictature des Al-Khalifa pour la remplacer par une dictature chiite».

Des heurts avaient opposé jeudi soir de jeunes sunnites et chiites au sud de Manama, pour la première fois depuis le début des protestations conduites par les chiites pour exiger des réformes politiques.

Les Etats-Unis considèrent l'archipel comme un allié-clef. Manama abrite le commandement de la Ve flotte qui patrouille le Golfe et protège les voies de circulation du pétrole.