L'administration Obama, en quête de solutions à la violence qui se poursuit en Libye, s'est montrée prudente mercredi sur la question d'une intervention militaire pour déloger du pouvoir Mouammar Kadhafi, veillant toutefois à «n'écarter aucune option».

«Il y a beaucoup de prudence au sujet des actions que nous pourrions engager dans d'autres domaines que le soutien aux missions humanitaires», a lancé la secrétaire d'État Hillary Clinton lors d'une audition au Sénat à Washington.

La chef de la diplomatie américaine a décrit une situation incertaine, alors que les troupes fidèles au colonel Kadhafi tentent des contre-attaques.

Les États-Unis redoutent aussi qu'à long terme, «la Libye s'enfonce dans le chaos et devienne une Somalie géante», c'est-à-dire un territoire sans loi ni gouvernement, dans lequel Al-Qaïda pourrait trouver un lieu sûr.

Hillary Clinton a également pris acte de la mise en garde de la Ligue arabe contre toute intervention militaire étrangère.

«La question difficile de savoir s'il faut une intervention pour aider ceux qui s'opposent en Libye (au régime Kadhafi), et sous quelle forme, est très controversée en Libye et dans la communauté arabe», a-t-elle souligné.

La Ligue arabe envisage toutefois de soutenir une zone d'exclusion aérienne en Libye, une idée débattue depuis une semaine par les États-Unis et leurs alliés de l'Otan.

Les sénateurs américains, en particulier le chef de la commission des Affaires étrangères John Kerry -- un allié démocrate du président Barack Obama -- soutiennent une telle initiative, qui serait lourde à mettre en oeuvre.

«Je pense que nous sommes loin d'une telle décision», a dit Hillary Clinton, même si cette option est «étudiée» par Washington et ses alliés.

D'ailleurs, a-t-elle à nouveau souligné, les États-Unis «n'écarteront aucune option tant que le gouvernement libyen tournera ses armes contre son peuple».

Deux navires de guerre américains, dont le porte-hélicoptères USS Kearsarge, ont traversé le canal de Suez et rejoint mercredi la Méditerranée pour se positionner au large de la Libye.

Les deux navires seraient capables d'assurer un soutien à des opérations humanitaires aussi bien que militaires. Mais dans l'immédiat, les moyens militaires américains semblent mobilisés pour un soutien à des opérations humanitaires.

Alain Juppé, le nouveau ministre français des Affaires étrangères, avait observé mardi qu'une intervention militaire en Libye pourrait être «extrêmement contre-productive» dans l'opinion arabe.

Elliott Abrams, un analyste conservateur souvent prompt à taxer l'administration Obama de mollesse, a jugé mercredi l'hésitation américaine «compréhensible».

«Une intervention directe», écrit-il dans son blog du Centre des relations étrangères (CFR), «priverait les Libyens de ce que les Égyptiens et les Tunisiens ont gagné en se débarrassant des dictatures sans intervention étrangère: le sentiment de contrôler le destin de leur pays».

M. Abrams suggère un moyen terme, qui serait d'armer l'opposition à Kadhafi.

Interrogée sur l'aide que Washington pourrait apporter à cette nébuleuse, la secrétaire d'État s'est, là encore, montrée prudente.

Les États-Unis, a-t-elle dit devant un autre groupe de sénateurs, cherchent à savoir qui est «légitime» et qui est «opportuniste»: «Il est prématuré de reconnaître l'un ou l'autre groupe».

Dans l'immédiat, a-t-elle conclu, «nous devons nous concentrer sur la mission humanitaire, tout en cherchant à recueillir de l'information».