Le gouvernement du Canada affrète des avions en Libye - à 500 $ le siège -, mais recommande expressément aux gens de ne pas se rendre à l'aéroport, une zone jugée trop dangereuse. Résultat : personne dans l'avion, et des familles mortes d'inquiétude ici.

Un travailleur québécois de SNC-Lavalin à Benghazi critique le gouvernement pour ce billet à 500 $ l'unité et pour ces vols qui ont tardé « pour des raisons d'assurances «.

Le travailleur campe avec 2500 autres employés de SNC-Lavalin sur le lieu de construction de l'aéroport de Benghazi, un contrat de 450 millions décroché par la firme de génie québécoise en 2008. Benghazi, seconde ville de la Libye, est tombée aux mains des opposants du régime Kadhafi en début de semaine.

« Notre campement a été pillé la première journée (...) Nous entendons régulièrement des tirs d'armes légères, et de temps à autre ce qui me semble être des tirs de mortier. «

« Nous avons commencé l'évacuation des 2500 travailleurs mercredi. En deux jours, plus de la moitié ont été évacués vers la frontière égyptienne. Les nouvelles que nous avons de ces convois sont bonnes. Ils se rendent tous bien, et nous devrions continuer aujourd'hui si nous recevons d'autres autobus libyens que nous louons. «

Plus tôt cette semaine, Francis Proulx, un autre employé de SNC-Lavalin, a multiplié les appels aux médias québécois, critiquant l'inaction du gouvernement canadien et de sa firme.

Mère inquiète

À Saint-Hyacinthe, sa mère, Louise Proulx, était très inquiète, hier, disant n'avoir pas eu de nouvelles de lui de toute la journée. À l'une de ses dernières communications, son fils disait envisager de prendre un autobus pour gagner une grande ville, lui qui se trouve à Sarir, dans le désert du Sahara, pour un projet d'irrigation.

Sa mère, elle, se gardait bien de critiquer qui que ce soit. « Dans leur cas, le gouvernement canadien et SNC-Lavalin ne peuvent pas faire de miracles : ils sont en plein milieu du désert. Mon fils s'est beaucoup plaint de son entreprise, dans les médias, mais il faut le comprendre : il est incroyablement nerveux. Comme un animal en cage. «

Encore hier, impossible de parler à qui que ce soit chez SNC-Lavalin, qui se trouve aussi dans l'oeil de la tempête pour avoir accepté un contrat de construction de prison en Libye.

SNC-Lavalin répondait aux demandes des médias par un court message courriel, disant refuser toute demande d'entrevue « pour des raisons de sécurité «, mais assurant que l'évacuation allait bon train.

Pour sa part, Anis Taghdi, qui réside à Toronto, se tient près de son ordinateur, dans l'attente de nouvelles de son père, qui a la citoyenneté canadienne et qui enseigne le génie civil à l'Université de Tripoli. « Je sens bien, en lui parlant à lui, et à mes amis, qu'ils ne sont pas à l'aise de parler au téléphone. Ils ont peur que cela compromette leur sécurité. Ils sont plus loquaces sur l'internet. Ce qu'ils me disent, c'est qu'ils ne veulent pas être évacués, préférant rester auprès de leurs frères libyens pendant cette crise. «