L'Italie, ancienne puissance coloniale et premier partenaire commercial de la Libye, a déclenché lundi l'alerte maximum dans ses bases aériennes, tandis que Silvio Berlusconi dénonçait «l'usage inacceptable de la violence».

Rome a également décidé l'envoi dans le sud de la péninsule d'un nombre important d'hélicoptères de l'Armée de l'Air et de la Marine.

Pour la première fois, le chef du gouvernement Silvio Berlusconi a dénoncé lundi «l'usage inacceptable de la violence contre la population civile». Dans un communiqué publié dans la soirée, il a plaidé pour «une solution pacifique qui assure la sécurité des citoyens de même que l'intégrité et la stabilité du pays et de la région entière».

Le Cavaliere avait été jusqu'ici critiqué pour sa prudence sur la crise en Libye, où les intérêts économiques italiens sont très importants.

Samedi, à des journalistes qui lui demandaient s'il avait des nouvelles du leader libyen dont il est proche, le Cavaliere s'était contenté de répondre : «nous ne nous sommes pas parlé. La situation évolue et donc, je ne me permets pas de déranger qui que ce soit».

Dans le même temps, l'Italie a lancé lundi un «plan de rapatriement» de ses ressortissants qui souhaitent quitter la Libye. Le premier vol spécial, civil, quittera l'Italie mardi pour Tripoli.

«L'objectif est de sécuriser et d'accélérer le retour de nos compatriotes», a indiqué à l'AFP un porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

La décision de déclencher l'alerte maximum dans les bases aériennes a été prise après l'atterrissage à Malte de deux avions de chasse libyens et de deux hélicoptères civils. Les pilotes des deux Mirage F1, ont affirmé avoir fait défection après avoir reçu l'ordre de tirer sur les manifestants à Benghazi, deuxième ville du pays, située à 1000 km à l'est de Tripoli, et centre de la révolte depuis le 15 février.

Selon des sources militaires maltaises, l'un d'entre eux a réclamé l'asile politique.

D'après ces sources, les hélicoptères civils transportaient quant à eux sept personnes se disant de nationalité française et affirmant travailler sur une plate-forme pétrolière en haute mer, du côté de Benghazi.

Mardi, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a convoqué les ministres concernés par la crise (Intérieur, Défense, Affaires étrangères).

Car pour l'Italie, l'enjeu est de taille.

Les deux pays ont signé en août 2008 un accord historique qui a soldé les comptes de plus de trente ans de colonisation italienne (1911-1942). M. Berlusconi avait alors présenté les excuses de l'Italie et s'était engagé à verser cinq milliards de dollars de dédommagements sous forme d'investissements sur les 25 prochaines années.

Depuis, l'Italie est à la fois le premier exportateur en Libye, avec une part de marché de 17,5%, et le premier débouché des exportations libyennes (20%).

Le «traité d'amitié» comprenait également une importante clause sur les reconduites de migrants en Libye, qui ont permis de réduire de façon draconienne les débarquements de clandestins en Italie.

Signe de l'étroitesse des liens entre les deux pays, l'indice vedette de la Bourse de Milan, le FTSE Mib, a terminé la séance lundi sur une chute de 3,59% à 22 230 points.

Ont été touchées de plein fouet les entreprises italiennes très présentes dans ce pays, comme le groupe pétrolier ENI, ou celles dont Tripoli est actionnaire, comme la banque UniCredit dont la Libye est le premier actionnaire.