Tunis a demandé dimanche à Ryad l'extradition du président déchu Ben Ali, accusé d'être impliqué «dans plusieurs crimes graves» et d'avoir incité les Tunisiens à «s'entretuer», tout en réclamant des informations sur son état de santé ou «son décès éventuel».

Dans un communiqué cité par l'agence officielle TAP, le ministère des Affaires étrangères indique avoir formulé une demande à Ryad afin de lui fournir «toutes les données dont il dispose concernant l'état de santé du président déchu, à la lumière des informations contradictoires véhiculées à propos de la détérioration de son état de santé et de son décès éventuel».

L'ex-président, âgé de 74 ans, qui s'est réfugié en Arabie saoudite le 14 janvier sous la pression de la rue, se trouve dans un hôpital de Jeddah dans le coma à la suite d'un accident vasculaire cérébral, avait indiqué jeudi à l'AFP un proche de sa famille.

Dans le même communiqué, le ministère annonce avoir «adressé par voie diplomatique une demande officielle aux autorités saoudiennes» qui a «pour objet d'extrader le président déchu» Zine El Abidine Ben Ali.

«À la suite d'une nouvelle série d'accusations visant le président déchu, accusations relatives à son implication dans plusieurs crimes graves qui consistent à commettre et à inciter à l'homicide volontaire et à semer la discorde entre les citoyens d'un même pays en les poussant à s'entretuer», la Tunisie a demandé son extradition, selon le communiqué.

La nouvelle série d'accusations «vient s'ajouter à la commission rogatoire émise par les autorités tunisiennes compétentes et adressée auparavant aux autorités judiciaires saoudiennes, dans le cadre d'une action inquisitoire intentée, actuellement, contre le président déchu et son clan».

Cette commission rogatoire concerne «des accusations ayant pour motif la possession de comptes bancaires et de biens immobiliers dans plusieurs pays, dans le cadre des opérations de blanchiment d'argent, acquis par voie illégale ainsi que la tenue et l'exportation illicites de monnaies étrangères», selon le communiqué.

Le président déchu, qui souffre d'un cancer de la prostate, et sa famille ont fui en Arabie saoudite le 14 janvier après près d'un mois de contestation populaire sans précédent, réprimée au prix de plusieurs dizaines de morts.

Ben Ali a régné sur le pays en bâtissant son régime sur un équilibre entre poigne de fer s'appuyant sur une police aujourd'hui honnie et prospérité, qui s'est finalement rompu, causant sa chute.

Père de six enfants, il apparaissait les derniers temps souvent accompagné de son épouse Leila Trabelsi. Selon des observateurs, il semblait fragile et sous l'emprise de sa belle-famille accusée de mainmise sur l'économie.

La révolte contre le pouvoir avait débuté à Sidi Bouzid (centre-ouest) après le suicide mi-décembre de Mohamed Bouazizi, un jeune chômeur de 26 ans empêché d'exercer comme marchand ambulant par les forces de l'ordre et devenu le symbole de l'exaspération des jeunes dans ce pays où le chômage touche près de 30% des jeunes.

Depuis son départ, les avoirs du président déchu ont été gelés dans plusieurs pays, de nombreux membres de sa famille ont été arrêtés et un mandat d'arrêt international a été lancé contre lui et son épouse.

Depuis, un gouvernement de transition, dirigé par son ancien Premier ministre Mohamed Ghannouchi et comprenant des membres de l'ex-opposition, a promis pluralisme et démocratie.