L'Iran, bien que secoué lui-même par une forte contestation intérieure, a salué la chute du président égyptien Moubarak en dressant un parallèle avec la révolution islamique iranienne 32 ans plus tôt et en annonçant un Proche-Orient «débarrassé» d'Israël et des États-unis.

«La coïncidence de la chute de Moubarak avec l'anniversaire de la révolution islamique d'Iran montre que le 11 février est le jour de la victoire des peuples de la région, et le jour de l'échec des États-Unis et du sionisme», a affirmé samedi le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale iranienne, Saïd Jalili.

«Moubarak et ses soutiens américains ont entendu la voix du peuple égyptien avec 30 ans de retard», a-t-il ajouté.

Pour sa part, l'ancien président Akbar Hachémi Rafsandjani a également qualifié de «coïncidence heureuse dans la région» la chute de M. Moubarak et l'anniversaire de la révolution islamique d'Iran.

«La révolte des Égyptiens peut être une inspiration pour (les peuples) arabes et d'Afrique du Nord et permettre de mettre fin à la domination de l'Occident», a-t-il dit selon l'agence Isna.

«Le régime sioniste est le principal perdant du réveil» dans le monde arabe, a-t-il ajouté.

Les dirigeants iraniens établissent depuis plusieurs semaines un parallèle entre les mouvements dans le monde arabe et la révolution iranienne de 1979, et le Guide suprême Ali Khamenei a appelé à l'instauration de régimes islamiques en Égypte et en Tunisie.

«On verra bientôt un nouveau Proche-Orient sans les Américains et sans le régime sioniste, et dans lequel les oppresseurs n'auront aucune place», a prédit vendredi le président Mahmoud Ahmadinejad en commentant les révoltes en Tunisie et en Égypte devant une foule immense rassemblée à Téhéran pour commémorer l'anniversaire de la révolution iranienne.

Le président iranien, donnant un accent messianique à sa prédiction, n'a pas hésité à voir dans les événements d'Égypte et de Tunisie le début du «mouvement final (...) d'une révolution mondiale» guidée par «la main de l'Imam» Mahdi, 12e et dernier Imam de l'islam chiite qui doit revenir un jour sur terre pour instaurer un règne de justice, selon les croyances de cette branche de l'islam  majoritaire en Iran.

La coïncidence des dates des deux révolutions a été largement soulignée par les médias, la télévision montrant en parallèle vendredi toute la journée les images des foules rassemblées à Téhéran et au Caire.

L'opposition réformatrice a toutefois fait une lecture diamétralement opposée des révoltes en Égypte et en Tunisie, estimant qu'elles étaient l'écho des grandes manifestations anti-gouvernementales qui ont secoué l'Iran pendant plusieurs mois après la réélection contestée du président Ahmadinejad en juin 2009.

Le pouvoir iranien a fini par écraser cette contestation par une répression sévère qui a fait des dizaines de morts et des milliers d'arrestations, laminant les milieux politiques et intellectuels d'opposition par des dizaines de condamnations souvent très lourdes.

Vendredi, seuls les partisans du pouvoir, massivement mobilisés et fortement encadrés, ont été autorisés à descendre dans les rues pour célébrer l'anniversaire de la révolution, les autorités ayant mis en garde les opposants contre toute tentative de ternir «l'unité nationale».

Elles ont également exclu toute manifestation de soutien aux peuples égyptien et tunisien que l'opposition souhaitait organiser le 14 février. Une nouvelle vague d'arrestations a également touché les milieux de l'opposition, tandis que l'une des principales figures réformatrices, l'ancien président du Parlement Mehdi Karroubi, a été bloqué et isolé à son domicile.

Ce qui a permis à Washington de répliquer vendredi à Téhéran que le gouvernement iranien semblait surtout «redouter la volonté de son peuple» et une contagion de la contestation qui s'est emparée des pays arabes.