Une très large majorité des députés tunisiens ont approuvé lundi une loi permettant au président intérimaire de gouverner par décrets-lois et de contourner ainsi leur assemblée dominée par l'ex-parti au pouvoir.

Sur les 195 députés présents, 177 ont voté pour, 16 contre (des représentants des petits partis d'opposition légaux) et 2 élus du RCD, le Rassemblement constitutionnel démocratique de l'ex-président Ben Ali, se sont abstenus, a indiqué Lazhar Dhifi, le rapporteur de la commission des affaires sociales et des droits de l'homme qui a présenté le texte.

L'assemblée nationale compte au total 214 députés.

Le Sénat doit se prononcer mercredi sur le même texte avant d'être ratifié par le président, Foued Mebazaa, puis publié au journal officiel.

«Ce projet de loi va permettre au président intérimaire de prendre des décrets-lois, conformément à l'article 28 de la Constitution», a déclaré Mohammed Ghannouchi devant les députés en session plénière au palais du Bardo, le siège du Parlement, pour leur première réunion depuis la chute du président Ben Ali le 14 janvier.

Une fois adoptée définitivement par le parlement bicaméral, cette loi permettra entre autres au chef de l'État par interim de prendre des décrets concernant notamment l'amnistie générale, les textes internationaux relatifs aux droits de l'homme, l'organisation des partis politiques, le terrorisme et le blanchiment, a précisé la commission rapporteuse du texte.

«Le temps est précieux. Ces décrets-lois, la Tunisie en a vraiment besoin pour écarter les dangers» qui menacent les acquis de la révolution populaire, a martelé le Premier ministre.

«La Tunisie est confrontée à des dangers. Il y a des personnes qui veulent faire revenir la Tunisie en arrière mais nous devons honorer nos martyrs qui se sont battus pour la liberté», a-t-il insisté.

Alors que les députés débattaient du texte, des centaines de manifestants se sont regroupés à l'extérieur du palais du Bardo, pour réclamer la «dissolution du Parlement», dominé à 80% par le RCD, toujours légal mais suspendu dimanche de toute activité par les autorités de transition.