Bras plâtré et visage marqué, Djokhar Tsarnaev, l'auteur présumé du double attentat qui avait endeuillé en avril le marathon de Boston, a comparu mercredi pour la première fois et plaidé «non coupable» lors d'une brève audience au tribunal fédéral de Boston.

L'adolescent musulman d'origine tchétchène, en tenue de prisonnier orange, s'est vu signifier les 30 chefs d'accusation retenus contre lui, dont 17 passibles de la peine de mort.

Il avait les pieds et mains entravés, les cheveux en bataille, l'oeil gauche gonflé et se touchait fréquemment le visage. Son bras gauche était plâtré jusqu'aux doigts.

Tsarnaev, 19 ans, qui avait été grièvement blessé par balle lors d'une confrontation avec la police le 18 avril, a répété sept fois «non coupable», au fur et à mesure que lui étaient signifiés les chefs d'accusation.

Dans la salle d'audience pleine à craquer, des victimes arrivées en marchant avec des béquilles, une des soeurs Tsarnaev en larmes, des jeunes se présentant comme des amis de l'accusé, dont l'implication dans l'attentat - l'un des plus graves commis depuis le 11 septembre aux États-Unis - avait surpris tous ses proches.

L'audience a duré sept minutes. La sécurité avait été renforcée pour l'occasion. Certains journalistes étaient arrivés six heures à l'avance pour être sûrs de pouvoir y assister.

Parmi les proches de victimes, Liz Norden, mère de deux fils de 33 et 32 ans grièvement blessés dans l'attentat, amputés chacun d'une jambe.

Venue au tribunal pour essayer de comprendre, elle n'a trouvé aucune réponse. «J'en ai été malade», a-t-elle confié après l'audience. «C'était très douloureux», a-t-elle ajouté.

«Je n'ai vu aucun remords» dans les yeux de l'accusé, regrettait aussi John DiFava, le chef du policier du MIT tué par les frères Tsarnaev durant leur cavale.

Une poignée de personnes étaient à l'inverse venues soutenir l'accusé, persuadées de son innocence. «J'ai fait ma propre enquête, c'est une manipulation du FBI», expliquait Duke Latouf, de Las Vegas.

Un procès de 3 à 4 mois

Le double attentat commis le 15 avril près de la ligne d'arrivée du célèbre marathon, en plein centre de Boston (Massachusetts, nord-est) où étaient massées des milliers de personnes, avait fait trois morts et 264 blessés.

Tsarnaev, naturalisé Américain l'an dernier, et qui vivait depuis 10 ans dans la région de Boston, était au moment du drame étudiant sur le campus de l'Université du Massachusetts (U-Mass) à Dartmouth, et semblait bien intégré.

Il est accusé d'avoir préparé et fait exploser, avec son frère aîné Tamerlan, les deux bombes artisanales placées dans des cocottes-minute remplies de clous et de billes d'acier pour en maximiser les dégâts.

Tamerlan, 26 ans, le plus radical des deux, a été tué lors d'une confrontation avec la police le 18 avril.

À l'issue d'une vaste chasse à l'homme, Djokhar avait été arrêté le lendemain, grièvement blessé, caché dans un bateau entreposé dans un jardin de Watertown, en banlieue de Boston.

Sur une paroi intérieure du bateau, il a expliqué son acte. «Le gouvernement américain tue nos civils innocents. Je ne peux pas supporter de voir ce mal rester impuni. Nous, musulmans, sommes un seul corps, vous faites du mal à l'un de nous, vous nous faites du mal à tous». «Je n'aime pas tuer des civils innocents. L'islam l'interdit (...), mais arrêtez de tuer nos innocents et nous arrêterons» aussi, avait écrit Tsarnaev.

Arrivé à Boston à 8 ans avec sa famille en provenance du Daguestan, Djokhar Tsarnaev était profondément marqué par son histoire familiale, ballotté, enfant, du Caucase du Nord au Kirghizstan, avant d'immigrer aux États-Unis en 2002.

Les deux frères, qui semblent avoir agi seuls, avaient préparé leurs bombes à partir d'instructions du magazine en ligne Inspire, une publication d'Al-Qaïda, selon l'acte d'accusation.

Djokhar Tsarnaev est notamment accusé «d'utilisation d'une arme de destruction massive ayant causé la mort» et «d'attentat dans un lieu public ayant causé la mort».

Son procès est encore loin. Il devrait durer de trois à quatre mois, a estimé mercredi la juge, qui a évoqué de 80 à 100 témoins.

Une prochaine audience technique est prévue le 23 septembre, à laquelle il n'assistera pas.