Ancien mentor et ami de Chérif Kouachi, l'un des deux auteurs de l'attaque de Charlie Hebdo à Paris, Farid Benyettou a désavoué le passage à l'acte de Kouachi, estimant que «c'est le pire crime qu'un musulman puisse commettre».

En 2008, ils avaient comparu ensemble devant un tribunal parisien, accusés d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste dans le cadre d'une filière de recrutement d'apprentis-djihadistes envoyés combattre l'armée américaine en Irak.

Condamné à six ans de prison, Farid Benyettou, 33 ans, a depuis été libéré, puis a brillamment réussi le concours d'entrée à l'école d'infirmier.

Il était en stage à l'hôpital parisien de la Pitié Salpêtrière quand il a appris que son ancien disciple avait, en compagnie de son frère Saïd, décimé le 7 janvier à la kalachnikov la rédaction de l'hebdomadaire satirique, criant avoir «vengé le prophète».

«Je condamne ce qui a été fait», a-t-il dit dans une interview lundi soir à la chaîne d'information en continu iTÉLÉ. «Je veux faire passer ce message: l'islam condamne tout ce qui a été fait. L'assassinat lâche et monstrueux des journalistes, celui des policiers et de membres de la communauté juive. Cela ne doit pas être attribué à l'islam. C'est le pire crime qu'un musulman puisse commettre.»

Il a expliqué s'être rendu de lui-même, dès jeudi, à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), où il a été interrogé puis remis en liberté.

Chérif Kouachi «est passé me voir à l'improviste il y a deux mois», dit-il. «Il ne voulait parler que du combat. Le bon rapport avec ses voisins, le comportement du bon musulman, il ne connaissait pas (...) Ce qui l'a guidé dans tout ça, ce n'est rien d'autre que l'ignorance».

Assurant n'avoir jamais eu l'intention de prendre lui aussi le chemin du djihad violent, il récuse l'idée que la France «opprime» les musulmans. «Je suis la preuve du contraire», fait-il valoir. «J'ai un casier judiciaire difficile à assumer. J'ai été condamné pour terrorisme, c'est le pire des casiers. Malgré ça, on ne m'a jamais discriminé».

Stagiaire depuis février 2012 dans l'institut de formation de la Pitié Salpêtrière, Farid Benyettou avait «présenté ses condoléances lors de la minute de silence jeudi», a indiqué la responsable de l'institut, Véronique Marin la Meslée.

«Les autorités nous avaient dit qu'il était connu des services et surveillé», a-t-elle ajouté. «Il avait été convenu que nous ferions le point si des choses anormales se passaient.»

Farid Benyettou pourra obtenir son diplôme, mais son casier judiciaire lui fermera à vie les portes de la fonction publique.