Trois semaines après les attentats de Bruxelles, la ministre belge des Transports et de la Mobilité, la libérale francophone Jacqueline Galant, a été contrainte à la démission vendredi, après avoir été accusée d'avoir négligé des rapports pointant les «défaillances graves» en matière de sécurité dans les aéroports de Belgique.

Sur la sellette depuis 48 heures, Mme Galant a présenté sa démission au roi Philippe, qui l'a acceptée en fin de matinée, selon le Palais royal.

«La confusion orchestrée et théâtrale de ces dernières 48 heures m'empêche de continuer dans la sérénité dans l'accomplissement de mes dossiers», a ensuite expliqué Mme Galant lors d'une conférence de presse.

Après deux jours de tension croissante, le premier ministre Charles Michel, libéral francophone comme Jacqueline Galant, s'est donc résolu à se séparer de sa ministre qu'il avait jusqu'ici soutenue malgré les accusations d'incompétence qui la visait depuis l'entrée en fonction du gouvernement en octobre 2014.

En deux années difficiles à la tête du département de la «Mobilité», la ministre de 42 ans, très populaire sur sa terre d'élection (elle est bourgmestre de Jurbise, près de Mons), mais sans aucune expérience ministérielle, avait fait preuve de plusieurs maladresses, se trompant dans les chiffres des économies à réaliser dans les chemins de fer, attribuant un marché public à un cabinet d'avocats dans des conditions douteuses et annonçant à tort l'abandon du futur Réseau express régional (RER) autour de Bruxelles, pourtant attendu depuis plus de 20 ans.

Contredite par son administration

Mais moins d'un mois après les attentats qui ont dévasté l'aéroport de Bruxelles le 22 mars, ainsi qu'une station de métro de la capitale belge (32 morts au total), la position de la jeune ministre, amatrice de moto, était devenue intenable après qu'elle eut nié avoir reçu en 2015 un rapport de la Commission européenne soulignant des défaillances en matière de sécurité dans les aéroports belges.

Le rapport de la Commission, dont l'AFP a eu copie, jugeait notamment la Belgique «non conforme» dans ce domaine, pointant des «déficiences graves».

Jeudi matin, Charles Michel expliquait encore que deux fonctionnaires de la Direction générale du trafic aérien (DGTA) avaient bien reçu le rapport, mais pas le cabinet de la ministre.

Mais Mme Galant a été contredite par le propre chef de son administration, Laurent Ledoux, qui a lui-même démissionné jeudi en fustigeant son attitude. M. Ledoux, a expliqué qu'une réunion avait été organisée «le 27 mars 2015 avec le cabinet pour discuter des résultats préliminaires de l'audit de la Commission». Le «rapport d'audit final a été transmis au cabinet» de Jacqueline Galant le 29 juin, a-t-il ajouté.

«Capacité destructrice»

M. Ledoux avait également fait réaliser par un expert indépendant, à la suite des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher à Paris, deux rapports sur la sécurité des aéroports.

«Si la menace d'un attentat était par le passé fort hypothétique, la situation internationale nous impose de considérer avec plus d'attention cette probabilité. Le fait qu'une dizaine d'employés (de l'aéroport de) Bruxelles-National ayant accès aux zones critiques de l'aéroport aient été identifiés comme partis, ou ayant l'intention de partir, combattre en Syrie doit servir d'avertissement», écrivait l'expert, selon un extrait publié vendredi par le journal La Libre Belgique.

Selon l'ex-chef de l'administration des Transports, qui entretenait de longue date des rapports très tendus avec sa ministre, ces études ont également été transmises au cabinet de Mme Galant.

Charles Michel, qui continuait jeudi après-midi à défendre la ligne de sa ministre devant les députés, a dû reconnaître vendredi qu'«à l'issue de la séance plénière» de la veille, il avait été informé que, «contrairement à ce qui avait été dit, Jacqueline Galant et son cabinet avaient reçu un résumé du rapport de la Commission européenne en juin 2015». Cela a scellé le sort de la ministre.

Lors de sa conférence de presse, Mme Galant a dénoncé la «croisade médiatique» et la «capacité destructrice» de l'ancien chef de son administration, et dénoncé «l'amalgame qui vise à prétendre (qu'elle a) fait preuve de laxisme» en matière de sécurité.