Les forces de sécurité poursuivaient vendredi matin une vaste opération contre les islamistes détenant encore des otages à Bombay, au lendemain des attaques qui ont fait au moins 125 morts dans la capitale économique de l'Inde.

Des responsables de la police ont annoncé vendredi matin avoir secouru 39 personnes bloquées dans l'hôtel Oberoi/Trident, où 200 personnes étaient encore retenues jeudi soir.

«Nos forces sont engagées dans des opérations de ratissage et recherchent des gens qui pourraient encore être à l'intérieur (de l'hôtel). Nous vérifions chambre par chambre», a déclaré un assistant du commissaire de police de Bombay A.N. Roy, sans pouvoir dire «si l'hôtel est (...) à 100 pour 100 débarrassé des terroristes».

Un peu plus tôt, les forces de sécurité avaient indiqué que des commandos avaient pratiquement totalement libéré le Taj Mahal, l'un des deux hôtels de luxe attaqués.

Tôt vendredi matin, deux fortes explosions ont été entendues près d'un immeuble abritant un centre juif, où les islamistes retiennent un nombre indéterminé de personnes, dont un rabbin.

Un haut responsable militaire indien a affirmé que les assaillants étaient venus du Pakistan, souvent accusé par l'Inde de soutenir des activistes musulmans à l'origine d'attentats sur son sol. Le Premier ministre indien Manmohan Singh a accusé jeudi un groupe basé «en dehors» du pays d'être responsable de ces attaques coordonnées, dans une allusion voilée au Pakistan. Islamabad a rejeté ces accusations.

Selon l'agence de presse indienne PTI, citant des sources officielles, trois extrémistes, dont un ressortissant pakistanais, ont été arrêtés dans l'hôtel Taj Mahal.

Cet homme est présenté comme étant Ajmal Amir Kamal, un habitant de Faridkot, au Pakistan. L'agence affirme que les extrémistes sont membres du Lashkar-e-Taiba, un groupe armé islamiste basé au Pakistan et connu notamment pour avoir attaqué le Parlement indien en 2001.

Le Pakistanais a déclaré aux enquêteurs indiens, selon PTI, que le groupe de 12 extrémistes auquel il appartenait avait été conduit par un navire marchand à environ 10 milles nautiques de la limite des eaux territoriales indiennes et avait gagné Bombay à bord d'un petit hors-bord.

Des tirs et explosions ont été entendus jeudi tout au long de la journée aux abords des deux hôtels Taj Mahal et Oberoi.

Un incendie s'est déclaré à l'Oberoi, où étaient bloquées jeudi près de 200 personnes, dont 15 à 25 Français (selon le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner), 10 à 20 Israéliens voire plus (selon l'ambassade d'Israël à New Delhi), sept Italiens parmi lesquels un bébé (selon le ministère italien des Affaires étrangères) et sept membres d'équipage de la compagnie South African Airways (SAA).

La mégalopole de l'ouest de l'Inde, centre financier de la dixième puissance économique mondiale, avait été mercredi le théâtre d'une série d'attaques menées par des hommes armés de fusils d'assaut et de grenades, qui ont visé, outre les deux hôtels, huit autres cibles, dont la gare centrale et un hôpital.

Ces actions ont été revendiquées au nom d'un groupe islamiste se présentant comme les Moujahidine du Deccan, du nom du plateau qui couvre une grande partie du centre et du sud de l'Inde.

Au moins 125 personnes sont mortes, d'après la police, dans les attaques et les échanges de tirs. Près de 300 personnes ont été blessées.

Une dizaine d'étrangers figurent parmi les personnes tuées, dont un Japonais, un Australien, un Britannique, un Italien et un Allemand. Deux Canadiens ont en outre été blessés.

Parmi les 125 personnes tuées, un homme d'affaires de 73 ans, Andreas Liveras, ayant la double nationalité britannique et chypriote, a raconté jeudi à la BBC ses dernières heures d'otage dans le Taj Mahal, avant de mourir: «Tout le monde est terrifié, nous nous observons les uns les autres et tout le temps nous avons des palpitations cardiaques. Tout le monde est sur les nerfs».

L'un des islamistes retranchés dans l'Oberoi/Trident a fait savoir au téléphone à la télévision indienne que le groupe réclamait la fin des «persécutions» à l'encontre des musulmans d'Inde et la libération des islamistes détenus dans ce pays.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Milliband, a estimé que les violences de Bombay portaient «certaines empreintes» d'Al-Qaïda. Son homologue français Bernard Kouchner a lui aussi évoqué Al-Qaïda, déclarant que les agresseurs étaient soupçonnés de faire partie de la «nébuleuse» de ce réseau terroriste international.