Boston s'est métamorphosée en ville fantôme vendredi, avec pour seul fond sonore les sirènes, vrombissements de voitures blindées et concert d'hélicoptères des forces de l'ordre, lancées aux trousses des suspects de l'attentat du marathon depuis jeudi dans la nuit.

Avec 9000 agents déployés, les escadrons de policiers ont remplacé les cars de touristes dans cette chic ville portuaire aux allures européennes, où la traque infernale contre les frères Tsarnaev monopolise les esprits.

Tamerlan Tsarnaev, 26 ans, a succombé à ses blessures suite à une course-poursuite dans la nuit, tandis que son frère cadet Djokhar, 19 ans, était toujours en fuite vendredi après-midi.

Aucun métro ni bus ne circulaient, tandis que les rares piétons s'aventurant dans les rues avaient l'air égaré.

«C'est incroyable, je ne sais pas quoi faire», témoigne Ana, une touriste colombienne de passage, à la recherche d'un endroit où manger.

Le gouverneur Deval Patrick a ordonné à la population de rester chez elle et de «n'ouvrir la porte à personne, sauf s'il s'agit d'un policier bien identifié». Par ailleurs, les autorités ont demandé aux commerces ne garder porte close.

Sur Stuart Street, habituellement animée avec ses magasins et restaurants, on pouvait de porte en porte constater la même formule répétée à satiété: «désolé, nous sommes fermés».

Isolée du reste du pays, Boston n'était plus non plus desservie par les lignes de chemin de fer. La société Amtrak a annoncé que les terminus se feraient à New York jusqu'à nouvel ordre. De même, les compagnies de cars nationaux n'avaient plus de services au départ ou à l'arrivée de Boston.

«On est restés assis dans le noir»

À Watertown, où se concentrent les efforts de la police, non loin du campus du Massachusetts Institute of Technology (MIT), Jonathan Crespo regardait chez lui le film Zero Dark Thirty, qui retrace la traque d'Oussama ben Laden par les services de renseignement américains, quand sa nuit a basculé.

«Ma fiancée a cru entendre des voitures de police, je pensais qu'elle était sous l'influence du film. Mais j'ai vu de très nombreux véhicules, et j'ai entendu une sorte d'explosion, probablement une grenade sonore», a expliqué Jonathan. «J'ai eu très peur. Je ne m'attendais vraiment pas à ça», a-t-il confié.

Juste après, Tamerlan Tsarnaev, jeune homme d'origine tchétchène identifié jeudi par le FBI comme le suspect «numéro un», mourait à l'hôpital.

En entendant les explosions, le médecin David Schoenfeld, qui vit à Watertown, a décidé de se rendre à son hôpital de Beth Israel. Il est arrivé à temps pour traiter Tamerlan Tsarnaev aux urgences, tout juste transporté après l'échange de tirs avec la police.

«Quand le patient est arrivé, il était dans un état critique», a dit le médecin à des journalistes. Puis il est mort de ses blessures.

Autre habitante du quartier, Yvonne Alaykib a raconté les échanges de tirs qui résonnaient dans le noir: «C'était comme un combat, ça n'arrêtait pas, ça faisait peur».

Toute la nuit et toute la journée, les rumeurs ont gonflé, les habitants se précipitant sur leurs outils de communication quand ils n'étaient plus derrière leur fenêtre à observer les rues désertes.

«On est restés assis dans le noir, les portes fermées, en envoyant des SMS et en essayant de récupérer toutes les informations qu'on pouvait de nos amis», explique une étudiante, qui dit s'appeler Pallavi.