Le président français François Hollande a promis de «détruire l'armée des fanatiques» du groupe djihadiste État islamique (EI) tout en encourageant la France à rester elle-même, lors d'un hommage aux victimes des pires attentats de l'histoire du pays.

À rebours du ton martial employé depuis les tueries du 13 novembre à Paris par les autorités françaises, qui ont intensifié leurs bombardements aériens en Syrie, des milliers de personnes devraient défiler samedi à Londres, ainsi qu'à Madrid et dans d'autres villes espagnoles, contre un engagement militaire du Royaume-Uni et de l'Espagne dans le conflit syrien.

Deux semaines exactement après les attaques qui ont fait 130 morts et plus de 350 blessés à Paris, plus de 2600 personnes se sont recueillies vendredi dans la capitale parisienne, lors d'une cérémonie à l'hôtel des Invalides.

Lola, 17 ans, Élodie, 23 ans, Jean-Jacques, 68 ans... Les noms des victimes ont été égrenés dans un profond silence. «130 vies arrachées, 130 rires que l'on n'entendra plus», a dit, ému, M. Hollande, en référence à ces vies fauchées dans une salle de concert, dans des bars, des restaurants ou aux abords du stade de France, aux portes de Paris.

Face à leurs proches et à des dizaines de blessés, le président a promis «solennellement» de «détruire l'armée des fanatiques», qui agit «au nom d'une cause folle et d'un Dieu trahi». Mais la France «restera elle-même», a-t-il assuré.

Quelques familles de victimes avaient décidé de boycotter la cérémonie, accusant le gouvernement socialiste de ne pas avoir réagi assez fermement après de précédents attentats à Paris, en janvier. Dix-sept personnes avaient alors péri dans des attaques contre le journal satirique Charlie Hebdo, des policiers et un supermarché cacher.

«Cet hommage m'a beaucoup impressionné, même si au fond ça ne change rien à la douleur que l'on ressent», a déclaré François Giroud, père d'un jeune homme tué au Bataclan, une salle de concert.

Invités par M. Hollande à s'associer à l'événement en arborant au même moment le drapeau tricolore à leurs fenêtres, peu de Français ont répondu à l'appel, dans un pays réservé vis-à-vis des symboles nationaux. Mais sur les sites des attentats, des dizaines de personnes se sont recueillies, déposant ici une rose blanche, là un mot de soutien.

«Mieux vaut tard que jamais»

Après avoir plaidé à Washington et Moscou en faveur d'une meilleure coordination dans la lutte contre l'EI, qui a revendiqué les attaques de Paris, François Hollande a «appelé» les députés britanniques, «en solidarité avec la France», à approuver des bombardements en Syrie, en marge du sommet du Commonwealth à Malte.

Si les présidents américains Barack Obama et russe Vladimir Poutine ont dit vouloir «intensifier» leurs bombardements aériens contre l'EI en Irak et en Syrie et mieux les «coordonner», l'idée de «grande coalition» avancée initialement par François Hollande patine.

Elle bute notamment sur le sort à réserver au président syrien Bachar al-Assad, dont Paris et Washington réclament le départ mais que Moscou soutient sans faillir.

Pour la première fois vendredi, le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a envisagé que des forces du régime syrien puissent être associées à la lutte contre l'EI, «dans le cadre de la transition politique». Une déclaration saluée par son homologue syrien Walid Mouallem d'un «mieux vaut tard que jamais».

La quête d'une large coalition a encore été compliquée par l'écrasement d'un bombardier russe, abattu mardi par la Turquie (membre de l'OTAN et de la coalition anti-EI menée par les États-Unis) au motif qu'il aurait violé son espace aérien.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a dit vendredi vouloir rencontrer «face à face» Vladimir Poutine, en marge du sommet sur le climat (COP21) lundi à Paris, pour parler de cet incident qui a créé de fortes tensions entre leurs pays.

MM. Hollande, Obama et Poutine pourraient également discuter à nouveau de la Syrie en marge de ce rendez-vous, auquel 147 chefs d'État et de gouvernement sont annoncés - un record pour une conférence climatique.

Barack Obama avait appelé la semaine dernière ses homologues à venir à Paris pour montrer que le monde n'a pas peur des «terroristes».

La France a par ailleurs informé cette semaine le Conseil de l'Europe qu'elle allait «déroger à la convention européenne des droits de l'Homme» avec l'état d'urgence décidé après les attentats parisiens.

Concernant l'enquête, deux suspects clés restent activement recherchés, notamment en Belgique, où une sixième personne a été inculpée vendredi en lien avec les attentats.