Le premier ministre belge Charles Michel a rejeté jeudi les «critiques» à l'encontre des services de sécurité du royaume après les attentats de Paris, précisant que des informations venues de Belgique avaient contribué à l'opération de la police française contre une cellule de jihadistes mercredi à Saint-Denis, dans la banlieue parisienne.

Six perquisitions ont eu lieu jeudi matin dans l'agglomération bruxelloise dans l'«entourage direct» de Bilal Hadfi, selon le parquet fédéral belge.

«C'est un dossier qui existait déjà, suite au départ de Hadfi vers la Syrie», a précisé un porte-parole du parquet, Eric Van Der Sypt.

Bilal Hadfi, 20 ans, de nationalité française, mais résidant en Belgique, est l'un des kamikazes morts après avoir actionné son gilet d'explosifs sur l'esplanade du Stade de France. Les perquisitions ont été menées à Molenbeek-Saint-Jean, quartier réputé terreau du djihadisme européen, et à Jette et Uccle, deux autres communes bruxelloises.

Une autre perquisition a été menée dans le quartier bruxellois de Laeken, qui abrite le Palais royal, «dans le cadre du dossier Paris». Une personne a été interpellée, mais son degré d'implication «reste à voir», selon le parquet.

La Belgique a été mise en cause, notamment dans la presse française, pour avoir laissé une cellule jihadiste fomenter les attentats du 13 novembre depuis Bruxelles.

«Je n'accepte pas les critiques qui ont visé à dénigrer le travail de nos services de sécurité», a déclaré dans le même temps Charles Michel devant les députés, réunis lors d'une séance plénière exceptionnelle.

Le chef du gouvernement belge, 39 ans, au pouvoir depuis un an à la tête d'une coalition de droite, a reconnu que les attentats de Paris avaient été «perpétrés par une cellule franco-belge».

«Hier, à Saint-Denis, un attentat a été empêché notamment par des informations fournies par des équipes belges», a-t-il toutefois souligné, sous les applaudissements des députés de la majorité et de l'opposition.

«Je veux remercier, avec vous, nos policiers, nos agents de renseignements, nos magistrats, nos enquêteurs pour leur courage et leur mobilisation. C'est grâce à eux que des vies ont été sauvées», a plaidé le premier ministre, évoquant également l'opération antiterroriste de Verviers (est de la Belgique) en début d'année.

Combattre l'obscurantisme

Depuis janvier, la Belgique avait adopté une douzaine de mesures antiterroriste, autorisant notamment la présence de militaires dans les rues. Et elle a relevé lundi le niveau d'alerte, porté à 3 sur une échelle de 4.

Le match amical de football Belgique-Espagne de mardi a notamment été annulé, alors que tous les auteurs et commanditaires présumés des tueries n'ont pas été interceptés.

Ces mesures «ne suffisent pas», a toutefois reconnu jeudi M. Michel. «Le gouvernement a choisi de donner un signal fort en libérant 400 millions d'euros» dans le budget 2016, a-t-il annoncé. Ils serviront notamment au renforcement des services de renseignements via une augmentation des recrutements et des équipements à la disposition des services de sécurité.

«Pour les djihadistes qui rentrent (de Syrie), leur place est en prison», a estimé le premier ministre belge. Dans d'autres cas, un bracelet électronique pourra être imposé à des personnes radicalisées.

Dans les enquêtes liées au terrorisme, des perquisitions pourront en outre être menées la nuit, alors qu'elles sont actuellement interdites entre 21h et 5h du matin, et la durée de la garde à vue passera de 24 à 72 heures.

«Nous combattrons les ennemis de la liberté, tout en respectant l'État de droit», a promis Charles Michel.

«Aujourd'hui, nous sommes aux côtés de la France, aux côtés de tous ceux qui sont déterminés à combattre l'obscurantisme et la terreur. Et pour ce faire nous n'avons pas le droit de nous affaiblir», a répondu la chef de file des députés socialistes, Laurette Onkelinx (opposition).

«Il faut accepter de se remettre en cause. Depuis le cancer Sharia4Belgium (groupe extrémiste démantelé à Anvers, NDLR), les métastases n'ont pas arrêté de progresser. Nous devons voir cette réalité en face. La Belgique dans son ensemble est une des bases arrière pour les terroristes», a admis Mme Onkelinx, ministre de la Justice de 2003 à 2007.