Djokhar Tsarnaev, un jeune musulman d'origine tchétchène, a été reconnu coupable mercredi des attentats de Boston, les plus graves aux États-Unis depuis le 11-Septembre, et risque désormais la peine de mort.

Les 12 jurés ont pris 11 heures sur deux jours pour arriver à ce verdict unanime. Dans une salle d'audience à l'ambiance particulièrement lourde, en présence de nombreuses familles de victimes, ils l'ont reconnu coupable de la totalité des 30 chefs d'accusation retenus contre lui, dont 17 passibles de la peine de mort.

Tsarnaev, 21 ans, qui avait obtenu en 2012 la citoyenneté américaine, a écouté le verdict de 32 pages, pâle et sans réaction apparente, debout entre deux de ses avocats.

Sa peine sera prononcée ultérieurement, à l'issue de la deuxième phase du procès fédéral qui devrait commencer la semaine prochaine.

Les jurés devront alors décider entre peine de mort et réclusion à perpétuité.

Les attentats de Boston avaient fait 3 morts et 264 blessés le 15 avril 2013. Deux bombes artisanales avaient explosé dans la foule près de la ligne d'arrivée de son célèbre marathon. Le carnage avait traumatisé la ville et relancé la crainte du terrorisme aux États-Unis, presque 12 ans après le 11-Septembre.

Tsarnaev, qui avait agi avec son frère aîné Tamerlan, avait expliqué qu'il voulait ainsi venger la mort de civils musulmans tués par les États-Unis en Irak et en Afghanistan. Les deux frères, auto-radicalisés, avaient agi seuls.

Mercredi, le jeune étudiant à la silhouette fragile et chevelure indisciplinée a aussi été reconnu coupable d'avoir tué un policier, dans sa fuite avec son frère. Ce dernier est décédé lors d'une confrontation armée avec la police trois jours plus tard.

Soulagement des victimes 

Les parents de la plus jeune des victimes, Martin Richard, 8 ans, étaient dans la salle d'audience pour le verdict. Plusieurs victimes ou proches ont fait part de leur soulagement et remercié les jurés.

«Nous somme reconnaissants que Djokhar Tsarnaev soit tenu responsable du malheur qu'il a créé pour tant de familles», ont déclaré les proches du policer tué, Sean Collier.

Le maire de Boston, Marty Walsh, a exprimé l'espoir que ce jugement aide à tourner la page des attentats qui «ont à jamais laissé une marque sur notre ville».

La peine de mort n'existe plus depuis 1984 dans l'État du Massachusetts dont Boston est la capitale, et personne n'y a été exécuté depuis 1947. Les évêques catholiques y ont réitéré cette semaine leur opposition à la peine capitale.

Mais s'agissant d'un «acte de terrorisme avec utilisation d'une arme de destruction massive», Djokhar Tsarnaev relève de la justice fédérale.

Durant la première partie du procès, entamé le 4 mars, l'accusation avait présenté 92 témoins et de très nombreuses photos et vidéos parfois éprouvantes du carnage et des victimes. Elle avait décrit Tsarnaev comme un étudiant en échec vivant une double vie, un «terroriste» qui voulait «punir l'Amérique pour ce qu'elle faisait à son peuple», qui avait appris à construire des bombes avec son frère via le magazine en ligne d'Al-Qaïda «Inspire».

«Il voulait terroriser ce pays», avait affirmé dans ses déclarations finales lundi le procureur Aloke Chakravarty. «Ce jour-là, ils ont pensé qu'ils étaient soldats, qu'ils étaient moujahidines, et qu'ils transposaient leur combat à Boston», avait-il ajouté.

Garder l'esprit ouvert 

En raison des très nombreux éléments à charge, les avocats de Djokhar Tsarnaev ont reconnu qu'il avait déposé dans la foule l'une des deux bombes du marathon. Ils n'ont présenté que quatre témoins. Et sans chercher à excuser l'«inexcusable», ils l'ont décrit comme un adolescent sous l'emprise de son frère aîné, sans lequel selon eux, les attentats n'auraient jamais eu lieu.

Selon eux, c'était Tamerlan, 26 ans, le cerveau. C'est lui qui avait tué un policier trois jours après les attentats pour lui voler son arme. C'est lui qui avait téléchargé les documents pour construire des bombes, acheté les cocottes-minute dans lesquelles elles avaient été fabriquées. C'est lui qui avait fait toutes les recherches. «Tamerlan dirigeait et Djokhar suivait», avait déclaré l'avocate de la défense Judy Clarke, qui par le passé a évité la peine de mort à plusieurs de ses clients.

Djokhar Tsarnaev n'était qu'un jeune «attiré vers la passion et les opinions de son frère aîné, alors qu'il vivait une vie d'adolescent», avait-elle dit du jeune étudiant né au Kirghizistan et arrivé aux États-Unis à 8 ans avec ses parents, depuis repartis en Russie.

Et elle avait demandé aux jurés de garder l'esprit ouvert, pour la deuxième partie du procès.

Les condamnations à mort fédérales sont rares aux États-Unis: 61 condamnés fédéraux se trouvent dans le couloir de la mort, contre quelque 3000 relevant de la justice de leur État, selon le Centre d'Information sur la peine de mort.

Les exécutions fédérales le sont encore plus: quatre seulement depuis 1963, dont la dernière date de 2003.

Photo: AP

Djokhar Tsarnaev