Les premiers des 33 mineurs délivrés au Chili après plus de deux mois passés sous terre s'apprêtent à réintégrer jeudi leur famille, au lendemain d'un sauvetage historique, émouvant, et maîtrisé à la perfection, qui a tenu en haleine le monde entier.

«Au moins deux ou trois pourront sortir ce jeudi», vers 16h00, a déclaré le ministre de la Santé Jaime Manalich.

«Tous ont bien résisté sur le plan médical», a précisé Jorge Montes, directeur adjoint de l'établissement de Copiapo où ils ont été hospitalisés, à 50 km de la mine.

Luis Urzua, leader du groupe en tant que chef de quart, a été le dernier à être hissé à l'air libre, à 21h55 mercredi, après 69 jours passés au fond de la mine San Jose, depuis un éboulement souterrain le 5 août.

«Merci à tout le Chili et à toutes les personnes qui nous ont secourus. Je suis fier de vivre ici», a lancé ce père de famille de 54 ans, qui prit en main l'organisation sous terre après l'accident, rationnant la nourriture, avec deux bouchées de thon et un demi-verre de lait par mineur tous les deux jours.

«Mais ce qu'on avait, c'était la foi. On avait l'espoir qu'un jour on pouvait être secourus. On rend grâce à Dieu», a-t-il déclaré.

Le chef de file des «33» a longuement étreint le président Sebastian Pinera qui l'a «félicité pour avoir rempli son devoir de capitaine, en sortant en dernier».

M. Pinera a annoncé qu'un milliard de téléspectateurs avaient suivi les opérations dans le monde entier.

Les deux hommes et les secouristes ont ensuite entonné l'hymne chilien, casque de mineur sur le coeur.

Dans la capitale, Santiago, à 800 km au sud, un concert de klaxons a retenti dans les rues pour saluer la délivrance du 33e mineur.

A Copiapo, des milliers de personnes ont bruyamment fêté le sauvetage des mineurs, sur la place principale.

Dans l'hôpital de cette ville-dortoir de 150 000 habitants, les mineurs ont subi des examens médiaux approfondis et reçu la visite du président Pinera jeudi matin dans une ambiance détendue.

Il les a invités au Palais présidentiel le 25 octobre prochain, et leur a proposé un match de football contre l'équipe de la Présidence.

Les médecins ont été «surpris» par la bonne santé physique et psychologique des 33.

Trois d'entre eux ont subi des opérations sous anesthésie générale pour des infections dentaires, et leur état post-opératoire «évolue très bien», selon le Dr Montes.

Un autre mineur souffre d'une «pneumonie aiguë», mais réagit «remarquablement» aux antibiotiques, a-t-il ajouté.

Il s'agit du doyen des «33», Mario Gomez, 63 ans, a précisé à l'AFP Jean Romagnoli, médecin qui suit les mineurs depuis des semaines.

D'un point de vue psychologique, les mineurs vont bien, ont tous passé une bonne nuit, et «aucun d'entre eux n'est en état de choc», selon le Dr Montes.

Les mineurs, devenus des héros et des proches pour les Chiliens, avaient demandé d'avance en début de semaine «un peu de patience» et «quelques jours» d'intimité familiale avant d'être disponibles pour les médias.

Les «33» ont été remontés en moins de 22 heures à bord d'une capsule aux couleurs blanc, bleu, rouge du drapeau chilien et baptisée Phénix en allusion à la «renaissance» des mineurs.

Avec une prière à genoux, un poing rageur brandi, un cri ou une blague, les mineurs ont salué différemment leur délivrance.

Mais tous, comme le premier secouru Florencio Avalos, 31 ans, ont longuement enlacé épouse, compagne, enfants.

Les six secouristes qui les avaient préparés au fond de la mine sont ensuite remontés, à leur tour après avoir brandi un panneau «Mission accomplie».

Manuel Gonzalez, le dernier, a laissé derrière lui la galerie de mine vide, avec la lumière des projecteurs allumée...

L'opération «San Lorenzo» (saint-patron des mineurs), pour retrouver et sortir de la mine les «33», a coûté «entre 10 et 20 millions de dollars» (sept à 14 millions d'euros), selon M. Pinera.

Le président américain Barack Obama, le chef de l'Etat brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, le gouvernement français et beaucoup d'autres, dont le pape Benoît XVI et l'ex-footballeur Diego Maradona, ont salué ce sauvetage.

Plus de 2 000 journalistes ont accouru pour le «happy end» de cette saga souterraine sans précédent.

Renaissance, miracle, accouchement réussi : la presse mondiale multipliait les métaphores jeudi pour exprimer la joie suscitée sur les cinq continents par le sauvetage des «33», à la fois mené et mis en scène de main de maître par les autorités chiliennes.