«Je suis tellement nerveuse que j'en ai des noeuds dans le ventre!» a dit la femme de Mario Sepulveda, quelques heures avant que son mari, soit extirpé des profondeurs de la terre. Surnommé «le présentateur» des 33, puisqu'il est l'animateur de toutes les vidéos envoyées à la surface depuis le début, tel que prévu, Il a été le deuxième à remonter du conduit à 1h15, heures locales. Elle allait enfin pouvoir embrasser l'homme qu'elle attend depuis plus de deux mois, depuis 69 jours, comme elle l'a précisé.

La nacelle qui allait lui rendre son mari est aussi rapide qu'un ascenseur, selon les autorités. Elle parcourt les 622 m qui sépare le tunnel de la surface, l'équivalent d'un immeuble de 250 étages, en 15 minutes. Chaque mineur a un casque muni d'écouteurs et d'un micro pour une communication permanente avec la surface, des bas de rétention pour éviter toute phlébite, quatre réservoirs d'oxygène à ses pieds en cas de problème.

«J'avoue que moi, j'ai un peu peur», a murmuré Silvia Sepulveda, soeur de Victor Segovia, qui devrait sortir le 15e selon les premières prévisions. On dit de Victor qu'il est l'écrivain de la mine depuis qu'il rédige le journal de bord des 33, que des maisons d'édition se battent déjà pour publier. «La mine nous en a fait tellement voir, a souligné Mme Sepulveda, que tant que mon frère ne sera pas dehors, j'aurais du mal à le croire.»

Mme Sepulveda, qui s'est fait hier des petites tresses et s'est un peu maquillée pour recevoir son frère, l'attendra dans l'hôpital de campagne, construit sur le terrain de la mine. Un honneur. Seules quatre personnes de chaque famille peuvent attendre leur proche à sa sortie. Les autres pourront le retrouver à l'hôpital de Copiapo, où chaque mineur sera transporté par hélicoptère, une fois qu'il sera stabilisé.

Au-delà de la nervosité que toutes les familles ressentent, de l'impatience aussi, le temps est celui des aux revoir avant d'être celui des retrouvailles. «Vous soutenir n'a pas été un sacrifice, a souligné l'assistante sociale du campement à toutes les familles réunies dans la tente de la cantine avant le début du sauvetage. Ce fut un honneur.»

Hier et aujourd'hui, les familles vont peu à peu abandonner ce qui fut leur maison, parfois la première, parfois la seconde. «Je suis arrivée parmi les premières ici, a souligné Lilianette Ramirez, femme de Mario Gomez, vétéran de la mine, qui avait écrit la première lettre arrivant à la surface, le 22 août, avec le petit papier dont la phrase est depuis devenue mythique au Chili: «Nous allons bien, dans le refuge, les 33.» «Et j'y suis restée, a repris Lilianette. Je ne pouvais être nulle part ailleurs. Me savoir tout près de lui, à Mario, ça lui faisait du bien. Et à moi aussi. Chez moi, à Copiapo, à 55 km de la mine, je ne me sentais pas bien, je me sentais trop séparée de lui.»

Le «campement de l'espoir» sera désormais conservé comme un sanctuaire que les touristes pourront venir visiter.

La nuit d'hier et toute la journée sont emplies d'une émotion indescriptible. Le Chili tout entier retient son souffle devant son petit écran.

L'image du premier secouriste, Manuel Gonzalez, qui a atteint le tunnel des 33 dans la nacelle, qui a embrassé chacun des 33 mineurs qui lui ont souhaité la bienvenue, a fait pleurer le campement. Une image surréaliste pour un sauvetage inédit, incroyablement mené, suivi en direct par le président Sebastian Pinera et par le monde entier.