Lorsque Oussama ben Laden a été tué par les forces spéciales américaines en mai dernier, bon nombre d'adolescents américains étaient perplexes. Ils n'avaient jamais entendu parler de l'ennemi public numéro un des États-Unis! Car en sol américain, l'enseignement des attentats du 11-Septembre demeure déficient. Ça ne semble pas être le cas au Québec. Ce qui ne veut toutefois pas dire que les théories du complot ont disparu.

«Qui est Oussama ben Laden?»

Dans les heures qui ont suivi l'annonce de la mort du chef d'Al-Qaïda, cette question s'est retrouvée parmi les cinq sujets les plus recherchés sur le site Yahoo! Et pas moins de 66 % des internautes qui l'ont soulevée étaient âgés de 13 à 17 ans.

Sur Twitter, un adolescent a carrément posé la question : «Qui est Oussama ben Laden? Est-il célèbre? Suis-je le seul à ne pas savoir qui il est?»

L'ignorance de ces adolescents, américains pour la plupart, ne tient pas seulement au fait qu'ils n'avaient pas plus de 7 ans lors des attentats du 11-Septembre. Elle reflète la place restreinte, voire inexistante, qu'occupe encore cet événement historique dans l'enseignement scolaire aux États-Unis.

Même à New York, le département d'éducation n'a adopté aucun programme commun sur les attaques d'Al-Qaïda, qui ont pourtant bouleversé la ville. Il incombe donc aux enseignants de décider s'ils aborderont le sujet et comment ils le feront. Les résultats de cette approche ne sont guère probants, s'il faut se fier à Len Romano, président du Conseil de l'État de New York pour les études sociales, qui regroupe des enseignants de cette matière.

«À moins que leur famille ait été touchée directement par la tragédie, ils ne savent pas grand-chose sur ce qui est arrivé», dit-il au sujet des New-Yorkais qui avaient 5 ans le 11 septembre 2001.

Le 10e anniversaire des attentats est évidemment l'occasion de corriger cette lacune. C'est pourquoi l'organisation de Len Romano a invité ses membres à échanger en ligne sur la façon dont ils aborderont ce sujet à la rentrée.

Kelli Gallaher, qui enseigne dans une école secondaire de Brooklyn, a l'intention de faire revivre à ses élèves les émotions éprouvées par les New-Yorkais au cours de cette journée tragique. Elle leur montrera notamment des vidéos des attaques des réactions de citoyens. Mais elle n'en restera pas là.

«Je veux que cette leçon serve de tremplin pour analyser où nous en sommes aujourd'hui en tant que nation, dit-elle. Nous sommes engagés dans deux guerres qui durent depuis aussi longtemps que se souviennent mes élèves. Mais plusieurs d'entre eux n'ont aucune idée de la raison pour laquelle nous sommes entrés en guerre en Irak et en Afghanistan.»

D'autres enseignants veulent également aller au-delà des attaques du 11 septembre 2001 en abordant les autres retombées de cette journée, dont le Patriot Act, la loi antiterroriste.

«J'ai souligné le neuvième anniversaire des attentats en traitant du Patriot Act avec mes élèves de 11e année», se souvient Christina Santoriello, enseignante à Lake Ronkonkoma, à Long Island. «Seuls deux d'entre eux pouvaient me dire un peu de quoi il retournait.»

Certains enseignants auront cependant l'impression de marcher sur des oeufs en traitant ce genre de sujet.

«Tout point de vue considéré comme anti-américain est tabou aux yeux de l'Administration et de la plupart des parents», dit Regina Alatsas, qui enseigne dans une école de Brooklyn. «Comment pourrai-je présenter le bon, le mauvais et l'affreux à l'occasion du 10e anniversaire du 11-Septembre ?»