L'UE a proposé mercredi un budget humanitaire inédit de 700 millions d'euros (1,02 milliards $ CAN) pour aider ses États membres en première ligne face à l'afflux massif de migrants, comme la Grèce, où quelque 10 000 personnes sont toujours bloquées à la frontière macédonienne.

L'engrenage des restrictions récemment décidées par les pays situés sur la route des Balkans a piégé en Grèce des milliers de migrants, faisant planer, selon l'ONU, la menace d'une crise humanitaire imminente.

Incapables d'apporter une réponse coordonnée, les Européens n'en finissent plus de se déchirer alors que les flux sont loin de diminuer, avec plus de 130 000 migrants arrivés en Europe par la Méditerranée depuis début janvier.

La quasi-totalité sont passés par la Grèce, principale porte d'entrée dans l'Union, à partir des côtes turques où continuent d'affluer des demandeurs d'asile fuyant la Syrie, où un fragile cessez-le feu est entré mercredi dans son cinquième jour.

Le président du Conseil européen Donald Tusk a de son côté évoqué cette «crise» à l'occasion d'une visite en Croatie, étape d'une tournée dans les Balkans devant s'achever jeudi et vendredi en Turquie, avant un sommet extraordinaire européen le 7 mars à Bruxelles auquel participeront les Turcs.

Dix mille migrants bloqués 

En attendant d'obtenir de la Turquie qu'elle en fasse davantage, la Commission européenne a rendu public mercredi un projet sans précédent : il s'agit de fournir une aide humanitaire d'urgence, non seulement à des pays tiers pauvres, mais désormais à des membres de l'UE.

«La proposition d'aujourd'hui rendra 700 millions d'euros disponibles pour fournir de l'aide là où elle est le plus nécessaire», a déclaré le commissaire européen chargé de l'Aide humanitaire, Christos Stylianides, proposant 300 millions d'euros pour 2016, et 200 millions pour chacune des deux années suivantes.

L'aide pourra être mobilisée pour tout pays en difficulté exceptionnelle. Mais elle «ira, dans une large mesure, à la Grèce, parce que c'est là que nous avons la crise humanitaire la plus grave», a assuré M. Stylianides.

Confrontée à une situation dramatique à sa frontière avec la Macédoine, où quelque 10 000 migrants sont bloqués en raison des restrictions imposées par les pays voisins, la Grèce a évalué ses besoins à 480 millions d'euros pour gérer, le cas échéant, l'accueil de 100 000 réfugiés au total.

La Macédoine a laissé passer mercredi plus de 300 réfugiés syriens et irakiens: un premier groupe de 170 réfugiés dans la nuit de mardi à mercredi et entre 130 et 150 autres qui ont ensuite graduellement franchi la frontière avec la Grèce.

Il s'agit des premiers groupes de migrants à avoir été autorisés à traverser cette frontière, point de passage de la route des Balkans à destination des pays de l'Europe du Nord, depuis des incidents survenus lundi entre des migrants et des policiers macédoniens.

Près du village grec frontalier d'Idomeni, dans un camp aménagé pour 1600 personnes, la situation humanitaire continuait de se dégrader. «Entre vendredi et dimanche, le camp est passé de 4000 à 8000 personnes. Là, on est à plus de 9000», a expliqué Jean-Nicolas Dangelser, responsable logistique de l'ONG Médecins sans frontière (MSF) à Idomeni.

Des migrants se cousent la bouche 

À deux mille kilomètres de là, en France, sur la route de migrants qui veulent rejoindre le Royaume-Uni, le démantèlement controversé de la partie sud de  «jungle» de Calais, s'est poursuivi mercredi, pour le troisième jour consécutif.

Huit migrants iraniens qui se sont cousus la bouche avec des aiguilles et du fil pour protester contre ce démantèlement partiel ont brièvement défilé dans une allée de la «jungle»: «Nous sommes des humains» ou encore «Où est votre démocratie ? Où est notre liberté?», pouvait-on lire, en anglais, sur leurs pancartes.

La partie sud de la «jungle» abrite entre 800 et 1000 migrants selon les autorités, mais près de 3500 d'après les associations. Entre 3700 et 7000 au total, surtout syriens, afghans et soudanais, vivent dans des conditions précaires dans l'ensemble du camp.

Plus au nord en Suède, l'une des destinations les plus recherchées par les migrants, l'agence nationale chargée des migrations a réclamé mercredi une rallonge budgétaire de trois milliards d'euros pour améliorer l'accueil des nombreux demandeurs d'asile.