La chancelière Angela Merkel a appelé les dirigeants européens à une action «commune» sur la crise migratoire lors de leur sommet de jeudi et vendredi, alors que la politique d'ouverture de l'Allemagne suscite des critiques de plus en plus fortes.

«Il s'agit en premier lieu d'avoir une position commune» notamment sur la question de savoir «comment nous voulons protéger nos frontières extérieures» face à l'afflux de migrants, a-t-elle déclaré mercredi lors d'une conférence de presse à Berlin avec le président du Sri Lanka, Maithripala Sirisena.

«Nous avons l'habitude qu'en Europe certaines choses prennent du temps» pour être acceptées et mises en place «mais cela vaut la peine de se mobiliser (...) et c'est ce que j'ai l'intention de faire pour parvenir à des conclusions communes» lors du sommet de Bruxelles, a-t-elle ajouté.

La situation humanitaire en Syrie est «insupportable»

Angela Merkel a par ailleurs jugé mercredi «insupportable» la situation humanitaire en Syrie suite aux récents bombardements et insisté sur sa proposition de zone d'exclusion aérienne dans le pays pour protéger les civils.

«La situation actuelle reste insupportable», a-t-elle déclaré à la chambre des députés, en estimant que «cette sorte de zone d'exclusion aérienne», qu'elle appelle de ses voeux, permettrait «de sauver de nombreuses vies» et de relancer le processus de paix.

La chancelière allemande est de plus en plus isolée au sein de l'Union européenne sur la question des réfugiés.

Les Européens n'ont jusqu'ici réussi à se répartir que quelques centaines de réfugiés passés par la Grèce et l'Italie sur un total de 160 000 qu'ils avaient fixé l'an dernier. Et l'idée d'un mécanisme permanent de répartition en liaison avec la Turquie, défendue par Mme Merkel comme la solution à la crise, est critiquée ouvertement. 

La France, principal allié de l'Allemagne en Europe, s'y est opposée le week-end dernier par la voix de son premier ministre Manuel Valls, qui a jugé que le cap suivi par la chancelière n'était «pas tenable» dans la durée.

L'Autriche, avec qui l'Allemagne avait agi en tandem pendant des mois sur la question des réfugiés fin 2015, a aussi pris ses distances et durci sa politique. Vienne a limité le nombre de réfugiés qui seront admis dans le pays et annoncé mardi l'introduction de contrôles généralisés à ses frontières avec l'Italie, la Slovénie et la Hongrie pour «freiner» les entrées de demandeurs d'asile en sécurisant douze points de passage avec ces voisins, y compris avec des clôtures si nécessaire.

En Europe de l'Est, la contestation est encore plus forte. La Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Hongrie - le groupe dit de Visegrad -, menacent une fermeture des frontières le long de la route des Balkans empruntée en 2015 par plus de 800 000 candidats à l'asile, en verrouillant notamment la frontière nord de la Grèce avec la Macédoine.

Ces pays doutent tant de la capacité de la Grèce à pouvoir assurer la surveillance de la frontière extérieure de l'UE que du plan avancé par la chancelière allemande avec la Turquie visant à lutter contre l'immigration illégale et mieux gérer les entrées en Europe des migrants ayant réellement besoin de protection.

L'option du groupe de Visegrad aurait pour effet de laisser la Grèce en grande partie seule face au problème, ce contre quoi Angela Merkel avait mis en garde mardi : «allons-nous abandonner et fermer les frontières grecques, macédoniennes, bulgares avec toutes les conséquences que cela aura pour la Grèce, l'UE dans son ensemble et l'espace Schengen?», avait dit la chancelière.